L.
C’est notre anxieux babil,
Tout deux maugréant la ville,
Je parlais de ce bonheur.
C’était mon désir puéril,
L’exil un peu trop facile
D’un de tes baisers de soeur.
M’as-tu donc nourri, idylle,
La ligne de tes faux cils
Close sur mon front rêveur ?
Ce fut toi, Lilith, nubile,
Qui négocia ce deal ;
Moi j’y laissai tout honneur.
***
L’auberge verte
Voir couler le sable,
Chercher un coupable.
– Un bon somnifère,
Et au lit cher frère !
Plus jamais le rire
Entêtant d’Elvire.
– Une veine ouverte,
Vers l’auberge verte ?
Nous étions heureux,
Heureux d’être tristes.
Si c’est être triste
Qu’être triste à deux.
Et un soir, alerte,
Vers l’auberge verte…
– Tirons la lumière.
Bonne nuit, cher frère.
***
Marine sans alcool
La crique où j’embrassai ta bouille
A la forme d’un oeil ;
Ce jour, la mer monte à son seuil,
La vue veuve s’y brouille.
– Hosanna ! Ton rire s’est tu !
Et l’océan sonore
Se rue dans l’encore et l’encore
De l’écume, – entends-tu ?
***
L’ombre rose
Le matin nié dans nos rideaux,
Le réveil à midi,
Et l’après-midi sombre ainsi
Qu’une ombre sur ton dos.
Cette ombre rose, chère amie,
Nous devinions sa fin.
La lumière sur ce défunt
Jour se fit : vint ma nuit.
***
1982 – 2002
J’ai trop de peine,
Petite soeur.
J’ai trop de peine
A ressasser
L’aube lointaine,
Les jours passés ;
C’en est assez
Pour ce vieux coeur.
J’ai tant de peine,
Et j’ai bien peur,
Petite mienne
Au sang glacé,
Que tout se meurt ;
L’aube lointaine,
Les jours passés
A ressasser
L’horreur.
***
Lézards filants
Je dors encor
A l’ombre des
Idées et corps,
Jetant mes dés,
Comme des morts !
Comme des sorts,
Flétris d’hasards,
Est-ce raccord ?
Sont-ce lézards
Filants ? – Trop tard !
Je crois à l’or,
Aux plus-values
Qui font du tort,
Aux chants sans plus,
Aux vers sans mors !
Passant décor,
Coquet très vain,
L’amour m’endort,
Comme ce vin
Crû tôt divin.
CLAUDE MARION
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