NEUF POÈMES
Tout restera toujours à dire mais
les moindres témoins murmurent en puissance
D’une ligne à l’autre, ce qui change ?
Ce peu, ce désirant qui ose l’être et tremble
Une venue attend à l’étroit des heures
l’heure où glisseront les verrous obsolètes
huilés au présent établi sans reports
À quel signe la pressentir ?
— Peut-être à un frôlement contre
les battants puis le fer
Elle se sait d’emblée défaite mais persiste
de toute sa faiblesse en aveu rassemblée
Ayant lu sur huis clos son manque et son encombre
elle se tient et se prononce, la Parole
qui par plus dense qu’elle est soulevée
Il y a plus de prévoyance à desceller
portes et fenêtres – les parages qu’elles accueillent –
de l’entre-soi le repéré le reconnu
La menue sagesse a besoin d’un vent
à même de tourner
des pages de bonace
Laisser, laisser les courants oxygéner un coin
inusité où des regards s’évasent
au nom d’un autre aujourd’hui, qui vaille
Du verbiage aussi bien, sous la semelle de la langue
Pas un temps à le faire entrer, desservant ce lieu
d’une épaisseur vaine et palpable
de résidus collés
Pourtant
l’écharpe est à son clou songeuse intarissable
et tout ici, de la poussière aux plans dressés,
comme prêchant l’ouvert ou l’abandon
Résigner, résigner à foison les mots ?
Ceux que l’on croit répandre et les empêchés
et ce qui bée sans eux, à deux blancs de ne plus se taire ?
Frémissement non localisé, annonce-t-il
ce près de quoi on brûlerait,
qui s’avouerait on ne sait quand
ou ne fait-il qu’entériner la fin de quelque chose
juste avant le profil étiré sans courbes, le platement plat ?
On se tient toujours entre, au mieux à l’angle d’éventuels
Angle parfois serré, aigu comme en ce moment,
pinçant de son petit mal incertain le creux, là
de l’insuffisance
Solidaires de la table et de haut en bas,
signes et intervalles
Zébrures sur papier,
du bois aux fibres devenues
Un rythme commandeur coextensif au reste
Le réel, son bord-à-flotter
– moins que de bas en haut la poussée muette
Manne des jours, lignes et voix
à longueur d’ici, que l’écart suspend
aux parois intérieures
Les accents de la faim au tempo serré
ne veulent plus les baumes inutiles
de trop d’Alexandrines chaloupées
à renverser, fausses souveraines
Tenir, s’en tenir à
un mot à mot sur de l’instable
à la merci des crues du vide
et de l’inadvertance
Et quand la mélancolie sourd
ouvrir autant que se peut l’enveloppe
où son feu implose
Ce qui dans l’omission demeure
et ce qui s’efface à peine dit
– cela, ce qui hante et fuit –
La lueur d’écoute en veilleuse limite,
un chiffre à deux clefs sur du papier flapi
Moins de loquacité, fendre les phrases
pour que diffuse une évidence
Après le regard
les yeux verront mieux,
dont le clignement questionne de l’obscur
CLÉMENT G. SECOND
Clément G. Second
Ecrit depuis 1959 : poèmes, nouvelles, notes sur la pratique de l’écrit principalement. Quelques communications artisanales à diffusion confidentielle.
Fréquente littérature, arts, philosophie et spiritualité.
A commencé à proposer ses textes à des revues (Le Capital des Mots d’Eric Dubois, La Cause Littéraire) depuis fin 2013 par besoin de plus d’ouverture. A collaboré à L’Œil & l’Encre, blog photo-textes de la photographe Agnès Delrieu.
Se sent proche de toute écriture qui « donne à lire et à deviner » (Sagesse chinoise ), dans laquelle « une seule chose compte, celle qui ne peut être expliquée » (Georges Braque), et qui relève du constat d’Albert Camus : « L’expression commence où la pensée finit ».
a1944@hotmail.fr