Vois cet arbre, comme c’est le Christ, comme on n’en peut pas douter. Il est de dos. Il porte un masque, le Grand Masque christique. Est-il quelqu’un ou quelque chose, est-il de la forêt, l’Esprit ? Vois comme il filtre la lumière à travers les branchages, comme il joue du pipeau. Il revêt la peau de bête du Grand Cerf blanc et brame son désir de moi. Sa sève coule dans la gorge et ce sont les Ivresses d’une langue inconnue. Il m’allonge et fait de moi sa Vierge, sa Femme Sacrée. Sous le Masque vénérable, il y a le reflet de ton œil bleu.
Jésus Christ est schizophrène. Toi, pour éviter la schize, c’est ton monde que tu as fracturé. Et je ne suis plus qu’un éclat de moi-même. Et l’Arbre Sanctifié entend les cris des oiseaux imaginaires…
Quant à moi, renard griffu, je bois l’eau de source au creux de ta main, car tu m’as apprivoisée. Tu me reconnais de métamorphose en métamorphose. D’une pensée nous quittons la forêt puis y retournons, lumière alternative. Blonde. Funambules sur la corde des mots, nous allons de la forêt à la « forêt », invention d’un langage et de bien des métempsychoses.
Extrait de "J'avais bien dit Van Gogh" (Editions Rafael de Surtis, 2017)
Catherine Andrieu est née à Metz en 1978.
Après avoir étudié puis enseigné la philosophie à Aix-en-Provence, elle est devenue artiste-peintre à Paris, poète et écrivain. Elle est l’auteur d’un essai philosophique De l’éternité du mode fini dans l’Ethique de Spinoza – « Le Chien Constellation céleste et le chien animal aboyant » (L’Harmattan, 2009). Elle a exposé à plusieurs reprises (sous le pseudonyme de Catleen) ses peintures et ses dessins sur photographie, à Paris et dans les Ardennes. Elle a publié certains de ses poèmes dans diverses revues de poésie (Soleils et cendre, Traversées, les cahiers du sens, Comme en poésie, Incognita, N4728, Point Barre, etc…).
Un premier recueil est paru en 2010 (Le Petit Pavé), Poèmes de la Mémoire oraculaire (2010), puis un second , Nouvelles lunes précédé de Chaosmose (Petit Pavé, 2013), enfin, un troisième : Seuls les oiseaux sont libres, toujours au Petit Pavé, en 2016.
Elle publie,depuis peu, des récits poétiques : "Ce monde m'étonne" ( Rafael de Surtis, 2017) , "J'avais bien dit Van Gogh" ( Rafael de Surtis, 2017) et " Très au-delà de l'irréel" ( Rafael de Surtis, 2018). http://www.rafaeldesurtis.fr/
Elle possède un site qui présente ses diverses créations : http://www.catherineandrieu.fr/