on l' a fait cet homme
pour que je sois réconciliée
avec mon sang
le drain et la lymphe
la veine à ma taille
le mouvement circulaire
une brise iodée
la rose qui pousse
sous l' épiderme
lui qui est
et qui vient
et qui pénètre
sans déposséder
le sol de ses nerfs
libertins
je suis la terre
et je ne suis pas la terre
je suis le pied et le pavé
route sous les sabots
forgés
du coursier blanc
qui me promène
il m' a rendue
insatiable et entière
du premier au dernier grumeau
j' appartiens au monde
pétri de mon argile
de lui qui arrose
et qui abreuve
j' aurais soif
encore
entamer le printemps
émotter les prairies
sillonner les ravines
accoucher de sa chair
de tout
pas assez
***
Il a souri
et les vitres se sont déversées
en sable
sous les roues immobiles
la main à son bras
je longeais les côtes du Chili
lui
il continuait ses pas
dans du gravier
au parking
j' ai suivi ocre et bleu
jusqu'au bout des plages
la fin d’après midi
et blanc de l’écume
le retour
ça brouille ça claque
au nez
on s'était balancé un moment
entre les toiles nouvelles
où les lignes se défont
des cubes
d’ascenseurs ou ses doigts
sur moi
où j ai voulu
saisir les contours
et je suis restée mains vides
les paupières pleines
de son visage
c' est très petit
la vie
quelqu'un prend une place
et tu te cognes aux portes
aux tableaux
aux horloges
au silence
en cherchant des mots
posés comme des lèvres
entre les omoplates
croire qu’ on était fait
à l’image des pégases
***
Il faut parfois des années
à regarder la pierre
deux poissons immobiles
deux émois lissés
satinés au cuivre
patientent se défaire de l écueil
remuer
les veines des reliefs
un sourire suave
un délicieux bouddha
enchante les sédiments
attendre
qu’ il descende
qu’ il se détache du rocher
dieu moine humain
homme
il faut que les mers soient salées
qu’ elles ravivent les branchies des murènes
que les murènes glissent humides
où il y a faim
sous le géant citronnier
la mer prend parfum
et excite les galets
moi
étendue sur les sables
je viens de heurter l’ univers
de même
dans la lumière tamisée
du citronnier au salon
je retourne
affecter nos empreintes
retrouver tes lèvres
DIANA BIFRARE
Elle se présente :
Née en Pologne en 1974 mais installée en Suisse francophone depuis 16 ans. C’est récemment que j ai pris goût à écrire en français.