Ma mère est un Dragon à quatre têtes
Ma mère est un Dragon à quatre têtes
Une tête jolie-
Trois têtes pourries.
La première sourit béate
La deuxième crache du feu
La troisième m’incendie du regard
La quatrième plante ses crocs dans mon cou.
Elle a les dents d’un vampire,
Le suçon d’une tique,
Le poison d’un serpent.
Elle se cramponne à ma peau,
Elle se nourrit de moi,
De mon sang,
De mon temps,
De mon cœur
C’est un Dragon sans loi sans foi,
Qui mord en rigolant.
C’est un vampire qui dit m’aimer,
Qui m’ouvre son cœur rempli de souffrance.
Est-ce à moi de le soigner ? –Non !
Je lève les bras, je tente de me protéger,
Ouvrir les yeux pour mieux voir
La sangsue.
L’agripper,
L’écraser,
La précipiter au loin…
A force d’écouter mon cœur,
J’ai appris à combattre les Dragons,
Les sangsues, les tiques, les vampires.
Ce Dragon de mère est des plus coriaces,
Il vient de loin de mon enfance,
Il est le plus proche à mon cœur,
A mon corps,
Qu’Il, Elle a engendré.
Mais le voilà qui rit à pleine gorge.
Ne pas me laisser attendrir !
Il enfonce ses griffes et farfouille,
Il cherche mes larmes, ma pitié.
Je me redresse,
Je plante mes jambes,
Décroise mes bras,
Et de toutes mes forces je repousse l’ennemi
Avec un énorme cri.
De mes coups de pieds dans le flanc,
J’abats le Dragon à quatre têtes :
Je le terrasse,
Le matraque,
Le tords,
Le balance,
Le pends,
Le suspends ;
J’écrase la première tête,
Je déchire la deuxième,
Le déchiquette la troisième,
Et piétine la quatrième…
L’ennemi à terre,
Le Dragon dans son sang,
Le vampire édenté,
La tique écrabouillée,
Je me relève
Et remets mes cheveux éparpillés
Remplis mes poumons de la Victoire !
Il me reste à affronter
Ma nouvelle condition d’orpheline
Et à respirer la Vie Libre !..............
Septembre 2014
***
Je n’ai pas envie que le jour me voie (1)
Un matin comme celui-là
Un matin comme un autre
Du mal à me lever
Du mal à assumer
Mais un effort je fais je traine mes pieds
Ma tête mal coiffée
J’ouvre à moitié le store
Non, je n’ai pas envie que le jour me voie
Je n’ai pas envie de me lever
De mettre un pied devant l’autre
De me débarbouiller
Pas envie de me regarder
Pas envie de m’aimer
Plutôt envie que quelqu’un m’aime
Que quelqu’un soit là
Que quelqu’un soit doux avec moi
La lumière m’aveugle
Mes idées se brouillent
Tels des nuages gris et blanc.
Non je n’ai pas envie que le jour me voie
Comme ça
Sans sourire
Sans le regard doux et aimant pour la vie
Lucide et clair
Joyeux et sincère
Me recoucher ?
Boire un thé ?
Appeler ?
Se connecter ?
Se relier ?
Pour réapprendre à s’aimer.
***
Je n’ai pas envie que le jour me voie (2)
A Denise Sbait
Je n’ai envie de me lever
De mettre un pied devant l’autre
De me débarbouiller
Pas envie de me regarder
Pas envie de m’aimer
Plutôt envie que quelqu’un m’aime
Que quelqu’un soit là
Qu’il soit doux avec moi
Je n’ai pas envie que le jour me voie
Telle que je suis à l’intérieur
Avec mes milles fleurs fanées,
Mes herbes brûlées
Un soleil sec
Et des cendres collantes
Mon volcan qui murmure
Mes oiseaux, tout de même bien vivants,
Qui en veut-il ?
Pour quelle chanson donc ?
Je n’ai pas envie que le jour me voie
La lumière aveugle mon cœur
Et brûle ma déchirure
Je ne suis pas belle au matin
Je ne peux pas avoir le regard franc
Le sourire doux
Et ce jour qui se lève sans me demander
Si j’ai envie de me lever
Si j’ai envie de regarder, de voir…
Non je n’ai pas envie que le jour me voie !
Mais voilà,
Je ne suis pas seule ce matin là
Un enfant est là
Un amour pas loin
Mais surtout une voix
Une voix protectrice, douce
Qui me sort de mon « non »
Et je vais ouvrir le store
Oui la lumière est là
Et le jour me voit
Je me sens aimée cette fois !
***
L’inconnue
A peine assise en face de toi
Ton regard planté dans le mien,
Un regard de souffrance.
La déception se lit sur ton visage,
Tu es malheureuse le regard au loin,
Jeune fille
Aux cheveux noirs et soyeux.
Et je ne dis rien,
Je reste en silence,
Bienveillante.
Quels sont tes soucis ?
Un amour déçu ?
Une amitié brouillée ?
Problème d’argent ?
De logement ?
Tu sens ma présence.
Mais que puis-je faire pour toi
Le long d’un trajet de métro ?
De nouveau ton regard glisse sur moi.
Je voudrais te parler
Te serrer dans mes bras,
Te servir une tasse de chocolat bien chaud…
Mais ici c’est le métro
Et nous ne nous connaissons pas…
Il y a des règles dans la société…
Je ne te regarde plus
Je te sens
Et respire en silence
Je pense :
Prends un peu de ma chaleur
Jolie et jeune inconnue.
***
La « venue d’ailleurs »
Elle est venue
Un sac sur ses épaules,
Elle est restée
Un coup de cœur pour le pays.
Elle ne savait pas ce qui l’attendait :
Adaptation.
Intégration.
Oublier sa langue.
Mettre de côté ses coutumes.
Car une tradition en dehors du pays
D’origine,
N’a plus de sens d’être…
Seule,
Elle apprit la nouvelle langue,
Et les mœurs de ce nouveau pays.
Longtemps lorsque
Tout le monde rigolait,
Elle ne comprenait pas.
Et jusqu’à maintenant,
Quand on parle
De choses sérieuses,
Elle tend l’oreille
Avec une double concentration.
Elle s’est faite petit à petit
Une place dans ce nouveau pays,
Qui devint le sien.
Acceptée,
Elle s’est sentie,
Aimée,
En voilà une nouvelle patrie !
Mais une partie d’elle
Est restée toujours là-bas,
Où l’on parle la langue
De son père.
Où elle peut entendre résonner
Le rire de son père…
Où ses souvenirs d’enfance
Ressurgissent
Comme les hirondelles
Au printemps.
Où des chants magiques
Sonnent.
Où ses amis d’enfance
La saluent…
Où les montagnes sont
Belles et majestueuses,
Et le ciel et la mer,
D’un bleu intense…
Mais dans le nouveau pays ah !
Mais dans le nouveau pays surtout,
Elle s’est défaite
D’une mauvaise mère,
Et elle vit à présent
Avidemment.
***
Au printemps
Au printemps
Je me découvre petit à petit,
Avec la timidité d’une none ;
Je m’habille de couleurs,
Je croise des regards qui me scrutent,
Je suis telle une fleur,
Fraichement éclose
***
Le balayeur
Février 2017
Toi le balayeur de la rue – que dit ton cœur ?
Toi le balayeur de la rue – quelles sont tes pensées ?
Toi le balayeur de la rue – quelle est ta spiritualité ?
Toi le balayeur de la rue – que manges-tu à Noël ?
Et tous les jours qu’y a-t-il dans ton assiette ?
Toi le balayeur de la rue – que deviennent tes enfants ?
Dis, balayes-tu les miettes des oiseaux
Ou bien les leur laisses-tu ?
Tes amis sont le vent et le soleil
Tes ennemies la pluie, la neige…
Dis balayeur de rue,
Sais-tu que tu es poésie pour moi
Lorsque je te vois ?
Février 2017
***
« Le cœur est ouvert au couteau »
Le cœur est ouvert au couteau
Pas de larmes, à sec
C’est le désespoir
Qu’un souffle parcourt.
Par hasard du soleil
Par hasard je respire encore
La vie autour belle, tranquille
Qu’est-ce que ça fait de se confier ?
Mal !
Car autrefois ça n’était pas possible.
Alors défaire les liens,
Sortir sa tête noyée de souvenirs
Puis reprendre le gout de l’espoir
Accepter le réel, l’ aujourd’hui,
Le maintenant,
L’amie assise en face de soi et qui sourit
Et s’avouer, oui s’avouer
Sa solitude.
28 /04/2016
EKATERINA DOBRINOVA
Elle se présente :