Les heures
De l’arbre de la thébaïde
je lance une par une les heures vermillon.
Elles roulent vers toi,
telles de grisantes chansons,
sur les trembles et les toits des maisons,
éclaboussant les inconnus de leurs arômes solaires.
Je cherche la pointe rebelle du jour,
pour y murer l’éventuelle souffrance des merles et des arbres,
mais où que je pose mon regard,
la ville semble se dissoudre dans un halo azuré.
Tout près, l’horloge de la gare s’érode.
La lumière-même n’est que sage vieillissement.
Nous le savons tous les deux, la musique est une déchirure cosmique.
Écoute toi aussi, là où tu te trouves,
l’orgue de la cathédrale qui annonce un vertige noble et sidéral.
***
Arrimage du jour
Attaques printanières, gorgés de vie,
face à l’absurdité des bacs éventrés du port.
Missionnaires éblouis,
au service de lointaines terres.
Rougeoiement sur le marc du sombre,
quatre voiles se déploient,
et s’échappent des bricks nivéens,
égaux en pureté aux sillons des oiseaux invisibles.
***
Portrait
L’espace vibre sous les ailerons de la vigne.
Les serpentaires se sont retirés dans les phares.
Les étoiles dardent pâlement des messages d’espoir.
Soleil des grandes espérances,
Recueillir vos mots qui deviendront des perles.
Lier leurs échos à la musique de la terre.
Toi, ailes velours aigue-marine et pluie d’argent.
Moi, invaincue.
CRISTIANA ESO
Cristiana Eso a publié (en juin 2019) un volume de poésie bilingue roumain-français Artisans de l’Invisible. Il est le Supplément de la revue A littérature-action, Collection « Ici d’ailleurs ».
Il peut être acheté auprès de l’Edition MARSA et sur le site www.revue-a.fr
Pour plus d'infos lire son interview : https://lettrescapitales.com/interview-cristiana-eso-le-poete-revele-la-place-que-nous-avons-dans-larchitecture-du-monde/