Le Capital des Mots.

Le Capital des Mots.

Revue littéraire animée par Eric Dubois. Dépôt légal BNF. ISSN 2268-3321. © Le Capital des Mots. 2007-2020. Illustration : Gilles Bizien. Tous droits réservés.


LE CAPITAL DES MOTS - SALVATORE SANFILIPPO

Publié par ERIC DUBOIS sur 1 Janvier 2011, 23:23pm

Catégories : #poèmes

VA BOSSER

 

 

Va bosser

Va trimer

Va te tuer à la tâche

Pour eux

Tu n’es que quantité négligeable

Tu n'es qu’un rouage

Interchangeable

Qui fait avancer le système

Pour eux

Tu n’es qu’un numéro

Qui fait partie du troupeau

Va bosser

Va trimer

Tu vis dans la misère

Tu as du mal à gagner quatre sous

Mais cela ne les émeut guère

Ils préfèrent garder le pognon

Pour faire leurs petites affaires

Pour devenir milliardaires

Va bosser

Sans la ramener

En courbant l’échine

Va trimer

Par tous les temps

Sous la pluie

Dans le vent

Dans la nuit

Tu n’es que de la chair à bosser

Ils n’en ont rien à cirer

Que tu te bousilles la santé

Y’en a d’autres

Des pauvres types comme toi

Dans la panade

Qui attendent que tu tombes

Pour prendre ta place

Et quand enfin on t’aura pressé

Exploité

Quand tu auras fait ton temps

Quand tu seras flageolant

Fourbu

Moulu

Brisé

Tu n’auras plus qu’à crever

 

 

 

 

 

 

 

Y’A UNE INCONNUE

 

Y’a une inconnue

Qui dort

Dans mon lit

Qu’est -ce qu’elle fait là

Se serait-elle trompée d’appartement

N’aurais-je pas poussé la bonne porte

Toutes ces maisons se ressemblent

Y’a une inconnue dans ma chambre

En petite tenue

Ne serait- ce pas un coup de ma femme

Qui veut tester ma fidélité

reçoit-elle des invités

Sans qu’elle m’en ait parlé

C’est peut-être un gag

Pour une émission de télé

Aurai-je donné rendez-vous

A une fille

Sans y penser

Je m’en souviens plus

Ma mémoire est défaillante

J’ai parfois des absences inquiétantes

Que faire

Me glisser dans le lit

Au risque de la réveiller

De l’effrayer

J’ai peur qu’elle crie à l’aide

Qu’elle me fasse passer

Pour un type mal intentionné

Et que quatre costauds

Avec de gros biscotos

Me tombent sur le paletot

Je suis fatigué

Je tombe de sommeil

Tout ce que je veux

C’est gagner mon plumard

Et dormir comme un bienheureux

Y’a une inconnue

Dans mon lit

Je crois que ce soir

Je vais aller dormir

Chez le voisin

Ou dans la niche du chien

Sans mon pyjama

Qui est coincé sous l’oreiller

 

 

 

J’AI MIS UNE AVOINE A SUPERMAN

 

J’ai mis une avoine

A Superman

Une chasse à Fantômas

J’ai envoyé Dark Vador

Dans le décor

Spiderman contre un platane

Quant à Zorro

Je l’ai cloué au porte manteau

Puis je suis rentré chez moi

Mais je me suis fait incendié

Par ma compagne

Parce que j’avais traversé le salon

Sans m’essuyer les pieds

Elle m’a mis deux torgnoles

Qui m’ont démonté l’épaule

Suis resté au tapis

Complètement estourbi

 

 

 

MES ARBRES

 

J’ai donné des prénoms

A mes arbres

Pour les sortir de l’anonymat

Mon tilleul s’appelle Robert

Mon cèdre Nicomède

Mon buis Jean- Louis

J’aime bien savoir

A qui je m’adresse

Quand je parle à quelqu’un

Depuis je les sens

Reconnaissants

Leurs feuilles sont plus vertes

Leurs fleurs plus épanouies

Leurs fruits plus beaux

Chaque soir

Je leur rends visite

Et j’ai un petit mot pour chacun

Je chante des berceuses indiennes

A Robert

Nicomède aime

La poésie surréaliste

Surtout celle d’André Breton

Jean- Louis a un faible

Pour le rock’n’roll

Quand je suis fatigué

Je m’assois à leur côté

Et parfois

Ils m’entourent

De leurs branches

Me soulèvent...

 

Et on joue

A la belote

 

 

SERRER DANS MES BRAS

 

J’ai serré dans mes bras

Ma concierge

Qui a toujours

Un mot gentil

A mon égard

Le facteur

Qui m’a apporté

La lettre de mon amie

J’ai serré l’épicière

Qui me fait souvent crédit

Le percepteur

C’était un peu intéressé

Mon supérieur

M’accordera-t-il une augmentation ?

Mes collègues de bureau

Faut soigner l’ambiance

Mon chien

Qui me fête

Chaque fois

Que je rentre chez moi

Puis j’ai serré dans mes bras

Une belle amazone

Dans la rue

Une sorte de madone

J’ai pas résisté

A sa beauté

Mais elle s’est offusquée

Elle a appelé les gendarmes

Ils m’ont coincé sur le trottoir

Je suis maintenant

Au mitard

Je serrerai bien dans mes bras

Le commissaire

Mais pas sûr

Pas sûr

Que cela

Arrange mes affaires

 

 

SALVATORE SANFILIPPO

 

 

Instituteur dans la Drôme.

A publié dans plusieurs revues : Traction Brabant, Gros Textes, Le Coin de la table, Les Hésitations d'un Mouche,  Verso...

Un recueil en 2009 aux éditions Voix Tissées : " Siffleur de Lunes"

 

 

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