Brèches et transgressions
(extrait)
à la mémoire de Fantômette
La chimère mutilée s'accroche au silence
S'obstine à conserver des lambeaux d'être
Et la douleur de l'amputation devient lieu fantôme
Morne et éphémère consolation
***
Dans un coffre d'oubli
s'arracher
en chien de fusil
irradier du sacrum
côtes, vertèbres, hanches
briser l'écartèlement
de la sphère et du temps
rire de la fureur
des astres
des naissances
avaler horloges et langues
***
le lit de la chair et des os
se creuse à nouveau
les iris s'écoulent en bruissement jaune
vol d'oiseaux au-dessus des marécages
***
obstinément
la bouche
battements jugulaire
tendons et nerfs
sur le visage de métal et de silice
s'échappe des marges
***
l'amas de fossiles voraces
bourdonne des doigts aux yeux
crie du nombril à l'anus
pleure des vertèbres au thymus
arrache la thyroïde et les rivières de ganglions
inflammation inflammation inflammation
débordement des sphères pleines
dans un aveuglement de compression mécanique
***
sédimentation de cadavres
strates de chevelures ossifiées
fossiles d'ongles et de dents
résine de pus et de morve
percée par le cri des roches
de toutes parts
libération d'autres corps
inachevés, inadaptés
***
humaine encore
aveuglée, éperdue...
assaillie
dévorée par des ciels sans lune
dans des paysages d'ogre
affamé de nuits
de tempêtes et de déluges
***
en suc salvateur
la coulée des abysses
silence de vents violents
peau de calcite
***
effroi de la trachée
à chaque pénétration
en flux continus
de tôles aux sourires diaphanes
dans une valse
d'agonisants
la terre expire
le dernier rêve
ANA MINSKI
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