La fatigue du monde
14/11/14
Le manteau du monde a des trous aux coudes
Et ses os qu’à travers, on rabote au marché
Comme un cancéreux, jusqu’au bout, il se vend
Pour une brindille de plomb cassée par le milieu
Là haut tout au bout il y a des oiseaux
Qui crèvent le bec pris dans de l’étoupe grise
En dessous, des crevasses immenses l’aspirent
Qui s’acharnent, monde accroche poussière, écharde molle
Dessus, des bêtes penchées sur leurs ravages
Se croient bénies– ô pâleur du sang qui existe
Etranger qui se morcelle en tombant des clochers
Unis dans le relent, tous ensemble frémissant
Nu sous sa nippe, crasseux de son passif
Piètre refaiseur de miracle, croit- il aux couleurs ?
Croit- il au parfum des fleurs ? Le tissu plastique
Qu’il jette, la pluie acide qui retombe en vrille
Lumière qui s’engouffre végète sur son passé
Des guerres qui entortillent jusqu’aux clameurs intenses
Le drap se déchirant, les jours dans le ciel glabre
La terre se brûlant les mains de sa résignation
Le manteau du monde a des trous aux coudes
Qu’on rebouche du cuir des bêtes mortes
S’user la corne à bouffer ses os, conserver
Les trémolos lascifs, les foudres d’autrefois
La cheminée s’étonne qu’il observe ses cendres
Et des bocks d’une bière acide au toucher
Comment fonctionne cette loi qui tressaille?
Monde se couvre de son bruit infernal
Une machine qui recoud et détisse en même temps
Qui s’interdit la pause pour ne pas se détruire
Dès lors que l’heure est passée, plus rien n’est derrière
Un rideau métallique harponne le bois tendre
C’est là qu’il blêmit, au centre de son cœur
Impuissant présage d’un innocent gâchis
Le monde se demande qui a bien pu faire ça
Et les bêtes rient aigre de le voir tourmenté
Alors il reprise son ténébreux manteau
Qu’un souffle de Lune suffit à soulever
Qu’un rai de Soleil suffirait à dorer
Des visions en coudières, le retour des idées
Le monde est décidé à changer sa tenue
Mais il est épuisé de s’être tant donné
D’avoir vidé ses fontes sur des tas d’immondices
Que des enfants trient en bas de leurs cités
Alors il s’achemine vers sa boucle bouclée
Alors il envisage sa fin atmosphérique
Et il s’étouffe entre ses bras blanc
S’embarrassant lui-même dans son arrachement
Le manteau du monde a des trous aux coudes
Les bêtes le piétinent en faveur de l’enfer
Et avec un anneau le noie dans un lac sans fond
Pour une brindille de plomb cassée par le milieu
XAVIER FRANDON
Il se présente :
Xavier Frandon est né Vierge ascendant Balance et Bouc de surcroît quelque part sur les bords d'un fleuve. Après des études consacrées à une des lorgnettes de l'humanité, Il émigre en région Parisienne en 2006 où il est l'heureux détenteur d'un métier tout à fait normal mais dont l'occupation légitime l'enrichit quasi quotidiennement. Il publie quelques articles dans des revues mais surtout...mais surtout ça ne rigole plus du tout depuis que ses poèmes emplissent des milliers de pages que le monde entier, avide, frétille d'impatience de découvrir. Il cherche des contacts, des intéressés de curiosités, avec qui partager le fond de sa pensée tout aussi indispensable pour lui-même que celui de son coeur.
Il tient prêts dans ses tiroirs des trésors qui ne demandent rien, mais qui sont là, qui attendent leur tour de passe-passe, qui attendent.
(Le Moulin de Poésie, Le Capital des mots, Paysages écrits, L'Autobus, Libelle, Gelée rouge, 392, La Traction Brabant, Le Florilège Soc et Foc, Microbe, Comme en poésie).