Terres d’emmanuelle P.
Je t’ai reconnue tout de suite
à la voix aux traits de tes paroles
tu grimpais le vallon de muscles enneigé
soupirant des mots au sang séché
j’étais l’aveugle à tes trousses
fait d’images aux fureurs profondes
d’éclaboussures jaillissantes
vite je t’ai touchée dans le vent des collines
par ma semence
raclant ta cuisse
tu rampais alors dans la terre
voulant échapper au désir sans recours possible
ton corps couchait déjà au ciel
dans une clarté grossière
alors vint mon plaisir sursaut de ta bouche
à l’assaut des promesses
chaque fois secourue
tu peignais l’espace de tes bras d’étoiles
étreintes de nervures emmanuelle
tu monnayes pour moi l’acte d’amour
qu’importe je viens endeuiller
les parois de ton ventre
le bleu de tes yeux inonde le bas du ciel
et ton corps se peuple
de caresses hypnotiques
paroles souffle coupé quel Dieu t’arrache
ces suppliques d’amour
pour qui pour quoi cette crue
cernant le seuil
à ce moment précis
je t’ai revue dans l’écho de tes cris
venue de l’eau
à distribuer tes lèvres
ô je te connais
combien de fois agrippé à ton bras
nous enjambions la haie du ciel
impeccable Octobre surgit de la vallée
sous tes jupes la laine recouvre maintenant
le désir pétrifié
(blessé-guéri)
il n’est plus question de putains
jamais
jamais tu m’entends ni de chants d’autrefois
Octobre appartient à nos mémoires
à
ta lumière
ce récit déborde dans la mort
le tri est sobre tu souris nages
vers lui
jusqu’au fanal Octobre
encore
pour t’éteindre en son corps
il ne peut dissiper la mélancolie
juste donner
un goût de la vie un moyen
Octobre encore quand tu soutiens ton ventre
encore poussé
jusqu'à offrir la tache rouge
ivre au soleil
entends-tu venir l’orage
ombres posées
dans le sommeil des pluies de mémoire
je te poursuis à l’assaut des collines
mue par les craintes de l’enfance
la nuit ridée coule de ton visage
noyé dans l’eau
des rêves
emmanuelle reprends au vol l’appel
du temps en perdition
loin
devant toi les cordes de l’espace
le feu des champs
emmanuelle la voie serpente dans le bois
brumeux maquis
là tu te vêts d’équilibre
et chemines au gré des douleurs
le pied aux abois
ainsi tu bricoles les mots pour me plaire
au risque démesuré
les flammes emmanuelle ont sauté
par-dessus l’heure vide
viennent lécher ce cratère de sons
ton écriture ressemble trop
à un soupir amer
dans ton ombre je prends l’ombre
pour ce qu’elle est
quand tu t’avances ainsi
cabrée
au creux des pages donnant le lisible en pâture
indocile et nue
dans la maison au masque de galet
ce soir l’absence d’oiseaux d’eau
donne à comprendre ma présence
terrifié par le silence qui bouillonne
terré sous la rive
je dois peser
ce que tu m’as offert puis retiré
ma main tremble
son extrémité absorbe la lumière
viendras-tu avec ta hache de paroles
pour m’amputer
le poids de tes yeux neige sur le monde d’en bas
j’ai quitté le plateau et marché jusqu’au fleuve
linceul me couvrant
tout
Je suis né en 1949. Après avoir exercé le métier de libraire à Paris, je vis aujourd’hui en Drôme provençale.
Publications :
« Au pas des gouffres ». Librairie Galerie Racine. 2015.
En revues : Phoenix, Les Hommes sans épaules, Spered Gouez, Poésie/Première, Recours au poème, Le Capital des Mots.