Le Capital des Mots.

Le Capital des Mots.

Revue littéraire animée par Eric Dubois. Dépôt légal BNF. ISSN 2268-3321. © Le Capital des Mots. 2007-2020. Illustration : Gilles Bizien. Tous droits réservés.


LE CAPITAL DES MOTS - JOSÉ MARIA ALVAREZ

Publié par Le Capital des Mots sur 29 Mars 2017, 08:21am

Catégories : #poèmes


 

IN A LONELY PLACE


 

«…Aquel lujo suave »

JOHN KEATS


 

« ¡Amor ! ¡En qué locura nos obligas a encontrar el placer! »

DE LAS « CARTAS DE UNA RELIGIOSA PORTUGUESA »


 

In memoriam Henri Rousseau


 

Hace ya muchos años

que nadie me despide

ni persona me aguarda


 

Lugares Gente Quienes por algún tiempo

al desterrado acompañaron

qué pocos resistieron

el paso de los años


 

Pero aquel hotel

cerca de la frontera

de Italia Donde las mimosas

cubrían las montañas

los pinares las playas

Donde la luz del sol sobre los bosques

hacía florecer el mundo


 

Y la vida era clara

como un vuelo de pájaro

o el mar en las arenas de oro

Ese lugar ha permanecido

No sé qué especie de amor

Pero no se precipita

solitario hacia la muerte


 

Allí una noche

lleno de sol de todo el día

bajo el efecto de unas copas

bebidas en compañía verdadera

el perdido borró sus cicatrices


 

Si alguno de vosotros

da con su cuerpo en esa tierra

que recordándome beba una botella

de buen vino del Sur


 

IN A LONELY PLACE


 

« Ce luxe suave »

JOHN KEATS


 

« Amour ! Dans quelle folie tu nous obliges à chercher le plaisir ! »

DES « LETTRES D’UNE RELIGIEUSE PORTUGAISE »


 

In memoriam Henri Rousseau


 


 

Il y a déjà bien longtemps

que personne ne me fait ses adieux

ni ne m’attend


 

Lieux Gens Qui pour quelque temps

accompagnèrent le banni

bien peu ont résisté

aux années qui passent


 

Mais cet hôtel

près de la frontière

d’Italie Où les mimosas

couvraient les montagnes

les pinèdes les plages

Où la lumière du soleil sur les forêts

faisait fleurir le monde


 

Et la vie était claire

comme un vol d’oiseau

ou la mer sur les sables d’or

Ce lieu est resté

Je ne sais quelle sorte d’amour

Mais il ne se précipite pas

solitaire vers la mort


 

Là-bas une nuit

plein du soleil de toute la journée

sous l’effet de quelques verres

bus en compagnie véritable

l’égaré effaça ses cicatrices


 

Si l’un d’entre vous

trouve son corps sur cette terre

qu’en se souvenant de moi il boive une bouteille

de bon vin du Sud


 


***


 

BELLE DE JOUR


 


 

Descálzate y camina sin miedo hasta la cama”

JOHN DONNE


 

Oh Ángel de esta noche

Bajo el cielo del Sur


 

Llena otra vez mi copa


 

Permite a mis sentidos renacer

Gozar de nuevo el cuerpo

De esta mujer que me acompaña

El resplandor de los jazmines en la calma

El avance sereno

Del amanecer que se avecina


 

Permíteme fumar un último cigarro

Mientras contemplo el mar y la llanura

La ciudad que descansa como un perro

El paso antiguo de los barcos

Sobre la claridad que empieza a levantarse


 

Permíteme beber la última copa

Y esta embriaguez sagrada El cuerpo

Caliente

De esta mujer Mi vida

Como una música lejana

Sean el telón de fondo

De este momento en que saber

Alcanza su equilibrio

                                  entierra

Los ojos del destino

                                        Y todo ya angustia cárcel

Persecución amores gloria derrota o luz

Se confunden borrosos

En el bajorrelieve


 

 


 

BELLE DE JOUR


 

« Déchausse-toi et marche sans peur jusqu’au lit »

JOHN DONNE


 

Oh Ange de cette nuit

Sous le ciel du Sud


 

Remplis à nouveau mon verre


 

Permets à mes sens de renaître

De jouir à nouveau le corps

De cette femme qui m’accompagne

La lueur des jasmins dans le calme

L’avancée sereine

De l’aube qui s’approche


 

Permets-moi de fumer un dernier cigare

Pendant que je contemple la mer et la plaine

La ville qui se repose comme un chien

Le passage antique des bateaux

Sur la clarté qui commence à se lever


 

Permets-moi de boire le dernier verre

Et cette ivresse sacrée Le corps

Chaud

De cette femme Ma vie

Comme une musique lointaine

Soient la toile de fond

De ce moment où savoir

Atteint son équilibre

                                 enterre

Les yeux du destin

                                      Et tout enfin angoisse prison

Poursuite amours gloire défaite ou lumière

Se confondent flous

Dans le bas-relief


 


 


 

***


 

SUEÑOS REVOLUCIONARIOS


 

La Furia, que ha cumplido ya su promesa”

VIRGILIO


 


 


 

Atroz Revolución, obscura y húmeda

como la fiebre. Útero de cuero. Desmesurado

pozo de serpientes

de ilusiones perdidas. Aún escucho tus alaridos

bestiales, el chirriar

del odio y la esperanza

de que te alimentabas. Horribles

astillas

del hielo de la furia. Ah tus ríos

de sangre, desbordando

cestos de mimbre,

empapando el serrín. Hay algo maravilloso,

madre brutal, algo que nos dabas a beber,

que calmaba la sed.

                                      Del abominable silencio,

del hedor, de la horrible, y vasta, y hermosa

crepitación nupcial

cuando los ojos te brillaban como hogueras,

oh, de eso nadie ha vuelto, nadie

de tu abrazo como vidrios rotos,

de tu lengua brutal

y espesa, cuando nos besabas.


 


 

REVES REVOLUTIONNAIRES


 


 


 

« La Furie, qui a enfin tenu sa promesse »

VIRGILE


 


 

Atroce Révolution, obscure et humide

comme la fièvre. Utérus de cuir. Démesuré

puits de serpents

aux illusions perdues. J’écoute encore tes hurlements

bestiaux, le grincement

de la haine et de l’espoir

dont tu te nourrissais. Horribles

éclisses

de la glace de la furie. Ah tes fleuves

de sang, débordant

des paniers d’osier,

trempant la sciure. Il y a quelque chose de merveilleux,

mère brutale, quelque chose que tu nous donnais à boire,

qui calmait la soif.

                                     De l’abominable silence,

de la puanteur, de l’horrible, et vaste, et beau

crépitement nuptial

quand tes yeux brillaient comme des brasiers,

oh, personne n’en est revenu, personne

de ton étreinte comme des verres brisés,

de ta langue brutale

et épaisse, quand tu nous embrassais.

 


 

 


 

 

LA TUMBA DEL HOMBRE BLANCO


 

El mundo será su viuda”

WILLIAM SHAKESPEARE


 

Sus huellas, viento o lluvia

o el desnudo desierto

las borran. Sueña con tierras, gentes,

océanos, el oro de ciudades

que en los siglos transmite

la infinita leyenda. No ama el viaje

sino tocar esa terrible

perla que aguarda en el Infierno.

Sus noches son la monstruosa

a sí mismo, y habla en lenguas

que son como el sueño. No le valen

ni la crueldad ni la aventura

ni el calor de la hembra. Hasta que un día

siente cómo su carne va adquiriendo

la paz del animal. Y busca

silencioso un cubil donde aguardar

esa última botella o esa selva

de fiebre o la abominable

entraña de los mares, donde

caerá sin nombre. En esa misteriosa

turba –locos, héroes, asesinos,

ambiciosos, guerreros- nadie deja

rastro. Sus huesos forman parte

de los tesoros del Oriente.


 


 


 

LE TOMBEAU DE L’HOMME BLANC


 


 

« L’homme sera sa veuve »

WILLIAM SHAKESPEARE


 


 

Ses traces, vent ou pluie

ou le nu désert

les effacent. Il rêve de terres, de gens,

d’océans, de l’or des cités

qui au long des siècles transmet

l’infinie légende. Il n’aime pas le voyage

mais toucher cette terrible

perle qui attend en Enfer.

Ses nuits sont la monstrueuse

à soi même, et il parle dans des langues

qui sont comme le rêve. Ne lui suffisent

ni la cruauté ni l’aventure

ni la chaleur de la femelle. Jusqu’au jour

où il sent comment sa chair acquiert

la paix de l’animal. Et il cherche

silencieux une tanière où attendre

cette ultime bouteille ou cette jungle

de fièvre ou l’abominable

entraille des mers, où

il tombera sans nom. Dans cette mystérieuse

tourbe –fous, héros, assassins,

ambitieux, guerriers- personne ne laisse

de trace. Ses os font partie

des trésors de l’Orient.


 

***


 

LA NOCHE AMERICANA


 


 

Tu vida es preciosa pues contiene

Todo aquello por lo que vale la pena vivir,

Juventud, belleza, sabiduría, valor, todo

Lo que la felicidad y lo más excelente pueden llamar suyo.”

WILLIAM SHAKESPEARE


 

Nada aquí es plebeyo”

PUBLIO PAPINIO ESTACIO


 


 

La lenta soledad de los cipreses

La sabia disposición del paisaje

Bajo la luz de oro que rocía el crepúsculo

Un hombre pasea por las sendas

Entre las ruinas de la Villa Adriana

Alguien que ya no tiene paz que ha aceptado

Que sus ojos se acostumbren

Al caos Y que quizá más tarde

Acepte la insensibilidad

                                                    Pero este atardecer

Las sombras alargándose junto al estanque

Los pájaros que se recogen

Como en otro mundo

                                    Por un momento

Contempla estos jardines como fueron

Y sueña que el Emperador y unos amigos

Y unas mujeres alegres cruzan

Ante él conversando entregados

Al esplendor del instante dichosos


 

Ha sido una ilusión Y él bien lo sabe

Pero en lo que ha sentido

Ha contemplado el paso sereno de la vida

Y el orden donde floreció su belleza

Y continúa su paseo

Con una suave sonrisa indescifrable


 


 


 

LA NUIT AMERICAINE


 


 

« Ta vie est précieuse car elle contient

Tout ce pourquoi vivre vaut la peine,

Jeunesse, beauté, sagesse, valeur, tout

Ce que le bonheur et le plus excellent peuvent nommer sien »

WILLIAM SHAKESPEARE


 


 


 

« Rien ici n’est plébéien »

PUBLIUS PAPINIUS STATIUS


 


 


 


 

La lente solitude des cyprès

La sage disposition du paysage

Sous la lumière d’or qui arrose le crépuscule

Un homme se promène sur les sentiers

Entre les ruines de la Villa Adrienne

Quelqu’un qui n’a plus de paix qui a accepté

Que ses yeux s’accoutument

Au chaos Et qui peut être plus tard

Acceptera l’insensibilité

                                     Mais ce soir

Les ombres qui s’allongent près de l’étang

Les oiseaux qui se recueillent

Comme dans un autre monde

                                               Pour un instant

Contemple ces jardins comme ils étaient

Et songe que l’Empereur et quelques amis

Et quelques femmes joyeuses passent

Devant lui en conversant voués

A la splendeur de l’instant heureux


 

C’était une illusion Et il le sait bien

Mais dans ce qu’il a ressenti

Il a contemplé le passage serein de la vie

Et l’ordre où a fleuri sa beauté

Et il continue sa promenade

Avec un suave sourire indéchiffrable

 

 

 

Extraits de « Museo de cera » (Ed. Renacimiento)


 

 

 

Textes traduits de l'espagnol par Marceau Vasseur et Miguel Angel Real

 

 

 

 

JOSÉ MARIA ALVAREZ

 

 

Présentation par Marceau Vasseur et Miguel Angel Real

 

José María Álvarez (Carthagène, 1942) est l’un des plus prestigieux auteurs espagnols. Poète, romancier, sa vie entière a été consacrée à la littérature, au développement de la culture et aux voyages. De sa très vaste bibliographie se détache « Museo de Cera », qui est une très large compilation de la plupart de ses œuvres. Il a traduit à l'espagnol l'oeuvre de Konstantino Kavafis, Hölderlin, la poésie de Robert Louis Stevenson, T. S. Eliot, François Villon et Shakespeare, parmi d’autres. En 1985 il organise un Hommage Mondial à Ezra Pound à Venise, et en 1990 il est nommé docteur Honoris Causa par l’Université de Dowling, New York, pour l’ensemble de son œuvre. Ses livres, dont la plupart peuvent être téléchargés gratuitement sur son site web www.josemaria-alvarez.com ont été traduits à plus de 20 langues.

Présent dans « Nueve novísimos poetas españoles », la célèbre anthologie de J.M. Castellet qui créa la polémique en 1970 en ouvrant de nouvelles perspectives à la poésie espagnole, J.M. Alvarez s’inscrit d’abord dans l’avant garde de l’époque, qui rompt avec la poésie sociale et revendique une création pleine de liberté et de références culturelles qu’on appellera ensuite « culturalisme », dont le langage soigné et la musicalité baroque invitent sans cesse au voyage, qu’il soit réel ou intérieur.


 

LES TRADUCTEURS


 

MARCEAU VASSEUR

Il se présente :

Après des études de sciences politiques et de philosophie à l’Université de Toulouse, il devient professeur de lettres en Bretagne, Colombie, Vietnam, Espagne, montant parallèlement des spectacles de théâtre avec lycéens et étudiants. Il habite désormais à Douarnenez où il co-traduit de la poésie espagnole contemporaine. Il a publié avec Loreto Casado « C’est peut être du toc, la vie » (La vida puede ser una lata) de Pedro Casariego (Le Nouveau Commerce, 1996).

***
 

MIGUEL ANGEL REAL

 

Il se présente :

Il poursuit des études de français à l’Université de Valladolid (Espagne), sa ville natale. Il travaille en 1992 à l’Agence France Presse à Paris. Agrégé d’espagnol, Inspecteur Pédagogique Régional dans l’Académie de Rennes en 2012, il enseigne au Lycée de Cornouaille à Quimper et intervient occasionnellement à l’Université de Bretagne Occidentale. Il se consacre aussi à la traduction et à l’écriture de poèmes. La revue Passage d’encres a publié certaines de ses traductions en collaboration avec Marceau Vasseur, en 2008.

 

José María Álvarez  - Source : http://luisantoniodevillena.es/web/articulos/jose-maria-alvarez-mare - DR s-de-decadencia/

José María Álvarez - Source : http://luisantoniodevillena.es/web/articulos/jose-maria-alvarez-mare - DR s-de-decadencia/

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