De la neige, Poésie
De la neige, Poésie
Doucement sur les croix des batailles
Dans les livres jamais lus
Tendrement
Baisera les aiguillages perdus
Sans ravage
De la neige
Les chevaliers sépulcraux
Ouatés glaives et givre
Sur les quais en attente
Maersk
Ta chapka
Amarres des tankers
Nul feu
Nul saccage
Lentement étoilée
De la neige, Poésie
Cristaux de molécules
Enfouira nos empreintes
Bourgeons et containers
Tes lacs acajous
Et ton sein décharné
De la neige
Amoureusement cognera
Arrière des écrans
Sur les soleils d'enfance
Les cartes les circuits
Les mémoires
Torrents amorphes
Les photos
Et les fous qui désirent
De la neige, Poésie
Nulle explosion
Sans ravage, pas de déluge
Seulement un silence blanc
Sans orage et qui dit les beautés
Sans lave et sans tempête
*
Si pauvrement humains
Amonumenmoureux
Amonumenmoureux
à la pointe du diamant
Tu veux
découper dans la roche
des blocs intouchés et heureux
qui feront monument
Amonumenmoureux
Amonumenmoureux
comme le rêve d’un enfant
dans l’îlot où il joue
dans l’horizon violent
sans limite sans garde-fou
Tu veux
Amonumenmoureux
Amonumenmoureux
iceberg brûlant le feu
des particules denses
et heureuses
s’affaissant
dans l’or des volcans
où boivent les géants
Amonumenmoureux
Tu veux
un Livre trouvé sur Mars
fossile de tes grands yeux
plus grand que les Bouddhas
cariatides et péristyles
qui tomberont bien tour à tour
si pauvrement humains
les colonnes de Palmyre
mangées par nos obus
Amonumenmoureux
Tu veux
les lacs asséchés de la lune
un monument heureux
comme une étoile déjà morte
quand sa lumière atteint nos yeux
humides et jaloux
Amonumenmoureux
Tu veux
ériger un palais de sel
à la croisée des mers
plus fort que la pierre
que les dalles de ciment
de tes doigts fins et noueux
un monument heureux
dans l’écume des plastiques
Amonumenmoureux
Tu veux
étirer les secondes
l’instant merveilleux
au-delà des années
des morts sur la jetée
Comme le rêve d’une enfant qui joue
dans l’orgueil intouché
Tu veux
Amonumenmoureux
Amonumenmoureux
*
L'embrasement
Dégager le S de l'embrasse
et s'avancer
dans l'embrasure du brasier
*
Le cap
Et ce n'est que moi
qui dis pour moi le cap
sans père pour ressentir
que moi et le cap
sans mère par où gémir
Et ce n'est que moi
qui vis de moi sentant
un cap par où marcher
pour le jour et la nuit
Et ce n'est que moi
qui vibre hors de moi
cercle d'eau d'ondes
et traverse ce monde
de lumières de gens
Jusqu'au cap
RAPHAËL ROUXEVILLE
Il se présente :
Les poèmes de Raphaël Rouxeville ont récemment été publiés en revue par Le Capital des Mots, Terre à Ciel, Lichen et Décharge.