Irrémédiablement
Les rayons du ciel se reposent quand vient la nuit. Et le poète, qui le premier cherche à fouler par la pensée les secrets printaniers, se sent envahi par la fatigue, quand déjà les ténèbres s'accrochent à la mort, celle du temps qui passe..., ce fantôme des Origines.
Le soir venu, liés une fois pour toute, l'amour s'unit au cœur, triomphant dans les alcôves aux oreillers parfumés à la lavande et au camphre.
Il y a quelque temps de ça, je voyais au pied d'un belvédère éclairé à la nuit tombante deux amants se dorloter longuement dans la rue, que j'appris à bien connaître par la suite...
Mais, aujourd'hui, effilochure d'âme, oh ! Mort ! tu te déposes irrésistiblement sur la poitrine pesante de la mourante qui, chaque soir, te craint dorénavant lorsqu'elle s'endort souffrante.
Ô les arbres centenaires du parc de la clinique imprégnés de l'odeur des décès ; et là-bas, mille trépas sont ici mille montagnes !
Ô les enfants du frère en pleurs devant le cercueil silencieux ! et l'amant foudroyé dans sa déchirante misère morale !
Et puis vinrent ces mains guidées par la joie du départ, qui conduit irrémédiablement la jeune morte au paradis christique.
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Tranquillement
Cette nuit, tandis que le soleil aux fils d'or suspendu disparaît derrière les branches d'un petit arbre à la ramure qui s'étoile, des fleurs se sont refermées sur une énigme. Pour une fois le temps est un ami. Les astres de feu brûlent le ciel, tandis que la noirceur nous inonde comme une mauvaise herbe.
Trépignant d'impatience je viens dans ce pré tranquille pour lui seul, le grand secret du monde : le sommeil. Ici je suis celui qui rit et qui pleure le plus, celui qui aime le plus ses amis et qui regrette le plus ses morts... Puis je me couche et m'assoupis sur l'herbe, tandis que le temps se retire doucement tout autour de moi, et avec lui la longue traîne des heures passées qui nous en séparent. Et la nature, fille offrante, libère ses gentils petits animaux pourtant si discrets la journée.
Voilà que je m'endors sans ne plus pouvoir bouger. Comment pourrais-je crever un doux rêve naissant et répandre ici son contenu si léger, sans ne pas trahir la nuit qui m'a accueilli en son sein ?
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OİSEAUX DE TİROİR
Des rivières de pelotes de roses, des doigts de chiffon et des boules de dentelle, des pierres d'éternité et des plumes de plomb fraîchement déballées jamais payées, descendent du ciel en lançant des éclats de gouttelettes ambrées jusqu'à la devanture du cœur du hasard condamné à prier pour nous, bousculant ces vieilles lampes à pétrole qui ne s'éteindront que lorsque les cerfs du bois viendront s'étouffer dans nos cheveux.
JEAN LUCQ
Il se présente :
Je m'appelle Jean Lucq, né en 1964, je suis un poète lyonnais. En ce moment je publie sur les revues en ligne suivantes :
Lichen et Le Capital des Mots.
Je collabore aussi aux revues papier d'Art'en-Ciel et du Moulin de Poésie.
Mail : jeanlucq7@orange.fr