LA NUIT
(A Léo FERRE)
C’est la lune dans le noir
Qui s’effile en croissant accessoire
Dans l’éclat métallique
D’une aube encore hypothétique
La nuit
C’est la fraîcheur qui s’affaire
En doigts de rosée éphémère
Dont le soleil en rayons
Efface les roses postillons.
La nuit
C’est le repos qui s’en va
L’insomnie au fil des draps
Et qui soudain rappelle
Fatiguée, l’aube nouvelle.
La nuit
C’est l’avenir qu’on emmène
En prairie de violettes,
La clairière en semaine
Le souci aux oubliettes.
C’est l’éclat troqué
Qui redore le monde
Avec des projets pailletés
En éternité de secondes
La nuit…la nuit…
***
TOI EMOI
(A Thierry Metz)
« Croiser ta voix c’est entendre, au loin un ruisseau.
C’est aller y chercher de l’eau, t’en donner.
Et seulement du bout des doigts, connaître la soif. » (Thierry Metz)
Croiser ton regard c’est plonger dans une mer étale
C’est partager l’écume soyeuse en rivage inabordé.
Et doucement flotter confiante, sans peur de l’eau.
Sentir tes mains dans l’intuition de mes courbes
Aux venelles sinueuses de ma chair assoiffée.
Et lentement accoster à l’intime de mon désir.
Tes lèvres : m’apprendre en chaque grain de peau
Les miennes : s’orienter en archipels de tendresse.
Lentement croît la violette au champ du possible.
Cueillir les rêves oubliés pour que l’été renaisse,
Au commencement d’une verte forêt défrichée.
En dévers d’un chemin, découvrir une clairière.
Voir un printemps de jeunesse l’automne arrivé,
Remettre à aujourd’hui tout improbable demain,
Inventer un langage où la minute se suspendrait.
Absente l’horloge du temps, ses tics tacs de fin
Musarder dans l’autre comme au sentier de soi.
S’interdire de trop penser pour vivre l’intensité.
***
PIERRE DE L’ABSENCE
Pierre de l’absence
émergence
d’un buisson ardent
brûlure de lèvres
en promesse d’au-revoir
L’attente
en vert printemps
au sang rouge
de la nuit
Des mots
éther sur la béance
de ma plaie
***
SEMAILLES
En bord de terre
en labour tracé
quelques graines
d’amour semées
puis le soleil pour mûrir
les épis que le vent cambre
jusqu’à moisson
gerbes conjointes
qui meulées au levain du désir
avec toi seront pain à partager
à nourrir de faim d’autres ventres
en clé des champs en clé de sol…
FANIE VINCENT
Elle se présente :
Fanie VINCENT, jumelle, voit le jour un 1er mai à Saint-Etienne. Tête dans les nuages, pieds en terre, une enfance entre ville de Loire et campagne de Haute Loire. Les mots sillons, elle les aborde très tôt avec Rimbaud, Prévert, Apollinaire, Eluard, Aragon, Desnos… Ensuite, elle découvre une poésie plus contemporaine du Monde avec, notamment, les poètes d’Amérique Latine.
Très jeune, elle écrit des poèmes, perdus dans un déménagement, puis de brèves nouvelles, un genre qu’elle ne délaisse jamais, parfois avec un besoin impérieux de jouer avec les mots. L’animation d’ateliers d’écriture entre Loire et Rhône et de nombreuses lectures favorisent son attention à la créativité des autres. Parfois « écrivain public », elle enseigne aussi notre belle et complexe langue aux migrants, en région lyonnaise, dans une structure de la Croix- Rouge. Elle amorce une publication modeste avec les Editions Christian Domec dans « infinis paysages ». Depuis elle entame une mutation dans la forme, mais la lecture des poètes de talent la rend très humble vis-à-vis de ses écrits personnels !
« La poésie rend la vie sur terre plus belle, moins éphémère, moins misérable » dit Adonis, Fanie tente de dessiner sur les ombres de sa vie, des rayons d’émotions joyeuses.
