La forêt de bouleaux
Pas à pas, je m’enfonce dans la forêt froide et dorée
Des bouleaux innombrables
Sans repères, sous le souffle boréal d’un ciel gris,
Mille souches, mille troncs identiques
M’égarent
Je taille un bâton pour progresser
Les copeaux rosâtres
Se répandent dans la futaie blanche et monotone
Un tapis de feuilles jaune d’or
Recouvre inexorablement mes traces
Peu à peu
Mes souvenirs s’éparpillent dans ce sous-bois perpétuel, voletant anonymes parmi les copeaux du monde
Mes pensées ressassées s’envolent autour de moi, indistinctes parmi les feuilles qui tourbillonnent et puis tombent, nourrissant les infinis fossés tourbeux de la conscience des hommes, cette forêt froide et dorée
Nous arrivons nus au milieu de nous-mêmes
***
Rêve vert
Jaillissant d’une brume tropicale, une liane géante s’enroule
À mes chevilles et m’emporte avec elle,
Je tournoie parmi les ficus géants d’un ciel émeraude
Des lichens arborescents émergent en cascade de mon torse prodigue
Me voilà cariatide fertile d’orchidées délicates
Les crosses des fougères arborescentes se déploient brusquement
Et disloque ma conscience en autant de frondes tomenteuses et élégantes
Mon crâne écartelé et épanoui accueille osmondes et capillaires
Un népenthès y déploie ses urnes en un diadème violine
Dans mon rêve vert, mon corps démantelé est support bienheureux de mille épiphytes
Dans mon rêve vert, mon esprit libéré se dissipe dans la moiteur,
Mince ingrédient d’un humus tiède et fécond
***
À tâtons
À tâtons
Dans le profond sillon de terre grasse, humide et lisse
Sculpté par le soc éblouissant
À tâtons
Parmi des bulbes sauvages sectionnés, les racines pâles mises à nu,
Parmi les vers séchés et les cloportes enroulés par centaines
À tâtons
Piqués profondément par les chaumes retournés
Les mains gluantes d’escargots fendus
À tâtons
Harcelé par les corbeaux freux
Empêtré d’argile et d’humus épais
À tâtons
Je cherche à échapper au géant
Qui vient semer
REMOUX
Il se présente :