Oriflammes Comme des feuillets d’almanach, Tes sourires vacillent dans le vent d’automne. Glorieux, le train meuglant Décapite la marguerite. Je ne peux, de mes plaintes, Déposer sur ton autel Les ouragans des grands naufrages. Cette olive diamant Ton essence, ta flamme, ton âme, Bruit en adieux pressés Sous le soleil mégot de crépuscule. Les mouchoirs des mères, Au verdict des sirènes, Deviennent oriflammes Et les guêtres dures rapetissent, se ramollissant Pour s’en aller crever en moues gamines, Dans les boues chaudes des derniers cris, Dans le duvet rapace de l’oubli.
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Miroirs A ces songes de la mer dont les vagues colportent la rumeur
Ô miroirs ! Engloutissez, donc, ma mémoire, Dans vos veines de tain et de lumière. Là-bas, Dans le jardin des échos, Arrosé des plaintes des vagues, Je dévalerai la plaine de l’oubli Où j’ai laissé fleurir un coquelicot, Pour ma muse Qu’un peintre agonisant a étranglée. D’elle, me parvient Le parfum ensanglanté De toiles inachevées. C’est dans le lait de ses rêves Qu’ont fleuri le cube et la sphère. Ô interstices du monde ! Laissez-moi donc percer Ses inaudibles secrets !
*** Sans valises Quand les ailes se déploient, Je me tais Et écoute mon maître le pigeon. Sans valises, Sans mémoire, Il décide de la portée de son clavier Et ouvre, seul, Les veines de la ville Et ses cieux.
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Derrière le souffle
Chute de feuilles Ivres de lune. Aboyant tournoiement, Comme la douleur Sous le soc des heures ! La figue ensanglantée crie Dans le miroir La trajectoire des veines. L’ombre se glisse, Derrière le souffle. L’oiseau n’a pas encore su se faire lumière. Il se cache dans le mouchoir mort d’un passager !
*** Chants de regards
Nous nous engendrons de nos silences, De nos regards qui chantent De ciel et de profondes nuits. Le poème recouvre nos linceuls Troués de questions en roses Et toutes nos horloges oubliées Qui lapaient des crépuscules sifflotés, A l’heure où la pierre rencontre La sanglante lumière Qui fait ailes de toutes mains.
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Ciel en lambeaux
Le clapotis des vagues bat les cartes effritées. Les rames nerveuses découvrent Le rire désargenté des écailles explosées Et le jasmin rouillé d’une dernière soirée Sans parfums ni lendemains. Le chat édenté ne peut plus miauler. Il pose ses pattes sur chaque rive du canal, Pour avoir, des pêcheurs, Quelques têtes de sardines éméchées. Une ombre chancelante jette toute grondante Comme une lune fracassée contre le phare vert La bouteille d’alcool à brûler en plastique, A flamber les veines pisseuses D’un vieux soleil fou fatigué Qui s’étrangle Dans les tourbillons nerveux Des cordes d’un oud fané Qu’on asphyxie Comme une grenade pourrie, Tête ensanglantée Qui vomit toutes ces promesses non tenues ! Les griffes noires du ciel en lambeaux Ecrivent sur les remparts Les cris bouffés par le sel de la morte lune ! ***
Paysage
Putride fiente de pigeons-corbeaux Comme des mots de radio Comme des chansons matinales soporifiques Glaire d’espoir au temps des glaives atomiques Lymphe carbonique d’appels phtisiques Partouzes de nymphes et de restes d’éphèbes assassins Flétris bourrés de protéines vaches !
Les os calcinés des nuages vomissent les rayons carnivores Des rendez-vous rapiécés dans les labos de survie De systoles diastoles plates des poubelles saturées D’azurs glacés dans les barbelés des mensonges planifiés ! | |