Paulus
Ta vis
Diabolicum
Sans fin
Ta haine
Paulus
Sans fond
Sans nom
Sans rien
Retourne Paul
Retourne-la
La vrille
Dans la chair du bois
Retourne
En amour
En amour
Sans fin
Sans fond
Paul
Amour
Sans nom
*
Pollock
N'écris absolument pas comme tu écris ; comme on te somme d'écrire jour après jour. N'écris surtout pas comme, lorsque tu penses, cela fait des phrases. Ecris davantage comme tu parles. Mais écris, d'abord, d'abord, un segment du flot de la pensée parasitaire, d'abord. Ecris, écris le voile orange, spermatique, qui défile sous tes paupières. Ecris ce qui fuse. Un moment. Ecris ce qui est fusion. Ecris la seconde à la seconde. Ecris ce qui ici traverse et te rencontre dans sa course. Ecris d'abord avec le mot libre, tache qui suit de son empreinte faible l'escarbille. Peins l'émotion qui vacille changeante dans un oeil ou dans un nuage. Ecris comme tu respires, comme tu mens que tu respires. Le mot n'a de valeur que dans l'instant où il est tracé par une main ; de sens qu'à la seconde où il est embouché par une bouche. Le mot d'avant est mort. L'émotion est déjà passée. Et ce mot-ci presque déjà trop tard. Ecris d'un jet. Ecris le jet.
*
Staël
Nos rendez-vous malentendus Nicolas de Staël
Dans les mers sales de roches
Sans bordure
Autant de rêves quel père quels cils
À s'en ouvrir à l'horizon
J'y mets des verges verbes de vagues
Grèves pétrolifères
Toutes veines glue en scories de sexes inversés
Effervescentes de poudres d'encolures d'ouïes
Que je marmore et je marmore
Marmore stratifiées
Sels pulvérisés et graves
Striés de Staël
Océans de plomb
Sables
Et de la sueur zone de parfaits embruns
Torsade de tes chevaux labour
Fous confondus
- Soleils ô combien bus -
Pour partie en coupe
Sur les échobuages limoneux
Des très-haut profonds marins
*
Saül
Tête de larmes
Saül
Pleine
Secoue secoue
Chien païen
Saül devenu Paul
Ours changé en agneau
Tu n'as rien perdu de ta violence
Au fond
Secoue secoue
Rondes
Comme mers
Si mortes si mortes
Tes larmes sous les palmes
Aux portes de Damas
Et renvoie tout
Au sable
Qui renvoie tout à la mer.
*
Les idéogrammes
La ville
C'est ma ville
Elle est sans aucune espèce de géographie
C'est une ville
Ou c'est une autre
La ville n'est pas ma ville
Elle est surtout absolument d'aucun rapport hagiographique
La lèpre
Elle est des lignes
Il faut en finir avec la ville
Avec cette ville
Ployer peut-être ses idéogrammes
Ascenceurs
Transcendance
Inutiles
Mon établi est doux, ville, tu verras
C'est un étendoir
Où je vois passer le vent
Tes couleurs, la lumière
Sans rien fixer
Je me prends à vouloir regagner avec toi l'horizontalité
À coucher tendrement sur l'étendoir ta verticalité de ville
Je me rends à l'évidence de poursuivre la ville plate
À courir nu sur l'horizon de la ville étale
Je traverse une ville dans sa latéralité
Ses largeurs
Sur un filin d’acier
Je rejette le point : Haut-Mal
Et le haut
Et sur une ligne je rejoins une autre ville
Je n'ai pas fait l'Azerbaïdjan
Je n'ai pas fait la ville
Je n'ai pas fait l'Argentine
Je poursuis des lignes
Je traverse des villes
RAPHAËL ROUXEVILLE
Il se présente :
La poésie de Raphaël Rouxeville a été publiée, depuis 2017, dans les revues Décharge, Le Capital des mots, Lichen, La Cause littéraire, Terre à ciel et Recours au poème.