POEMEDITACIÓN PARA NO DORMIR PROFUNDAMENTE
Respira por la nariz tres veces
Tres
Inhala Exhala
Inhala exhala.
Cualquier pensamiento que cruce por tu cabeza
No lo retengas
No lo juzgues
Déjalo ir.
Enfoca suavemente tu atención en tu brazo derecho
El mismo que estiras para pedirle piedad a la vida.
Sí
Ese con el cual te rascas la cabeza cuando no soportas los piojos
El que abraza tu estomago cuando el hambre crece.
Inhala exhala
Siente como poco a poco se hace denso
Como se hace pesado
Repite mi brazo derecho es pesado
mi brazo derecho es pesado
mi brazo derecho es pesado
Enfoca tu atención en tu brazo y
Deja que tu corazón también se haga de piedra
Que pese.
Olvida las muertes
Olvida la violencia
Las desapariciones.
Déjate llevar
Tu cuerpo es un río que desemboca en el mar
Siente como te arrastra la corriente
Escucha como ladra el agua
las piedras te muerden
Repite
Mi cuerpo es pesado
Mi cuerpo es pesado como el de Manuel Arias
Al que apodaban el mariachi.
Su cuerpo pesaba después ser asesinado a balazos.
O el de Raúl Hernández Romero
Golpeado y herido de muerte
Con un corte en la cabeza.
Mi cuerpo es pesado
Como el de la pequeña Fátima
Que fue violada, torturada y después
Puesta en una bolsa de plástico.
Porque entre más pequeño el cuerpo
Mas pesa.
Pesado es mi cuerpo
Mi cuerpo
Su cuerpo
Los cuerpos.
Inhala exhala
Siente como poco a poco
Todos los cuerpos caen sobre ti
Olvida el insomnio
Olvida las noches
que nunca serán como nunca
Siente como la miseria va quedando atrás
El infierno ha quedado atrás.
Escucha el agua ya no ladra
Y sabe a sal
Hemos llegado.
POÈMÉDITATION POUR NE PAS DORMIR PROFONDÉMENT
Respire par le nez trois fois
Trois
Inspire expire
Inspire expire.
La moindre pensée te traversant la tête
Ne la retiens pas
Ne l’examine pas
Laisse-la partir.
Dirige délicatement ton attention sur ton bras droit
Celui-là même que tu tends pour mendier à la vie de la pitié.
Oui
Celui avec lequel tu te grattes la tête quand tu ne supportes plus les poux
Celui qui étreint ton estomac lorsque s’enfle la faim.
Inspire expire
Sens bien comment il se fait dense peu à peu
Il se fait lourd
Répète mon bras droit est lourd
mon bras droit est lourd
mon bras droit est lourd
Dirige ton attention sur ton bras et
Laisse ton cœur aussi se faire pierre
Qui pèse.
Oublie les morts
Oublie la violence
Les disparitions.
Laisse-toi aller
Ton corps est un ruisseau qui se perd dans la mer
Sens comment t’emporte le courant
Écoute comment l’eau aboie
Comment les pierres te mordent
Répète
Mon corps est lourd
Mon corps est lourd tel celui de Manuel Arias
Qu’on surnommait mariachi.
Son corps était si lourd tué par tant de balles.
Ou celui de Raúl Hernández Romero
Frappé blessé à mort
D’une lourde plaie à la tête.
Mon corps est lourd
Comme celui de la petite Fátima
Qui fut violée, torturée, puis
Emballée dans un sac en plastic.
Car plus il est petit plus le corps
Est lourd.
Lourd est mon corps
Mon corps
Votre corps
Les corps.
Inspire expire
Sens comment peu à peu
Tous les corps tombent sur toi
Oublie l’insomnie
Oublie les nuits
Qui ne seront jamais comme jamais
Sens comment reste derrière la misère
L’enfer est resté derrière.
Écoute l’eau elle n’aboie plus
Elle a le goût du sel
Nous sommes arrivés.
***
BREVISIMO TESTAMENTO
Dejo mi piel
Delgada tela que violenta la ciudad y examina
Las calles con ojos tristes,
Las pequeñas ventanas donde hubo incapaces amores;
el mar sin mar de mi ciudad.
Dejo mis dedos fantasmales
Que transitaron aguas
Teclas
Vientres
Parpados de miel
Y por los cuales brotó la poesía
Como rio de corriente deshilachada.
Dejo mi cabeza
Mis dientes chuecos
Mis piernas de araña.
Dejo mi sombra quemada por la ceniza de los presagios
Desteñida por el fuego del libro nocturno.
Dejo mis sueños a medio cumplir.
Mi maquina
Que año con año
Como pequeño caballo galopó en busca de la fuente
Del orgullo donde la muerte muere.
Un par de libretas engusanadas
Por la pereza.
Algún llanto
Y algunas imágenes violentas del mundo.
TESTAMENT BRÉVISSIME
Je laisse ma peau
Fine toile qui agresse la ville et scrute
Les rues de ses yeux tristes,
Les petites fenêtres où elle eut des amours avortées ;
la mer sans mer de ma ville.
Je laisse mes doigts fantomatiques
Qui ont parcouru des eaux
Des claviers
Des ventres
Des paupières de miel
Et d’où a jailli la poésie
Comme une rivière au courant effiloché
Je laisse ma tête
Mes dents biscornues
Mes jambes d’araignée.
Je laisse mon ombre brûlée par les cendres des présages
Ternie par le feu du livre de la nuit.
Je laisse mes rêves à mi destin.
Mon ordinateur
Qui année après année
Comme un petit cheval a galopé à la recherche de la source
De l’orgueil où meurt la mort.
Deux ou trois carnets corrodés
Par ma paresse.
Quelques pleurs
Et quelques images violentes du monde.
***
ARENA NEGRA
Y querrás que la vida se detenga
Como el instante mismo en el que enciendes un cigarro
Y te detienes tú
Pero todo pasa.
Como no queriendo que te lleven.
Como queriendo estarte.
Pero es el viento hijo de puta que te arrastra a las calles
De la soledad.
Y la vida
Aunque bella
Tiene sus penas y el pan mendigado
En las esquinas donde se agazapan el frio y la oscuridad.
Te quedarás dormido en las escaleras de la tristeza
Justo frente a las puertas del hambre.
Es ahí donde sabrás que es mejor de dos en dos.
Porque de uno en uno somos polvo;
Polvo de nada.
Ahí
Desbordado
Cansado del rumor del rio entre las montañas
Si es que alguien se cansa del rumor del rio entre las montañas.
Ahí
Vencido
Esperando el calor de una voz que te susurra
En las noches de invierno.
Ahí
Tendido junto al mar nostálgico de Attila József
Que querrás cambiar por el mar bravío de arenas negras.
¡Oh! Mar
Milagro intempestuoso
Melancolía donde tu canción se deleita.
Envuelve mi alma
Que anhela la vida.
Mi corazón endurecido y desterrado de sus profundidades;
De todo este universo de sombras y canciones obstruidas.
¡Raro el que se mide a sí mismo en tu poder secreto!
Imponme el entierro.
Y si la oscuridad me hace caer
Que me consuma lentamente.
SABLE NOIR
Et tu voudras que la vie se suspende
Comme l’instant précis où tu allumes une cigarette
Où tu te suspends toi
Mais tout s’en va.
Comme si tu ne voulais pas être emporté.
Comme si tu voulais rester toi-même.
Mais c’est le vent ce fils de pute qui t’arrache vers les rues
De la solitude.
Et la vie
Belle toutefois
Connaît ses peines et le pain mendié
Aux croisements où se rejoignent froid et obscurité.
Tu tomberas de sommeil dans l’escalier de la tristesse
Juste en face des portes de la faim.
C’est là que tu sauras que c’est mieux deux par deux.
Car un par un nous sommes poussière :
Poussière de néant.
Là
Submergé
Fatigué par la rumeur de la rivière entre les montagnes
S’il existe quelqu’un de fatigué par la rumeur de la rivière entre les montagnes
Là
Vaincu
Attendant la chaleur d’une voix qui te murmure
Pendant les nuits d’hiver.
Là
Étendu près de la nostalgique mer d’Attila József
Que tu voudras échanger avec la mer sauvage aux sables noirs.
Oh mer
Miracle intempétueux
Mélancolie où ta chanson est un délice.
Envahis mon âme
Qui aspire à la vie.
Mon cœur endurci déporté de ses profondeurs ;
De tout cet univers d’ombres et de chansons interdites.
Qui peut se mesurer à soi dans ton pouvoir secret ?
Impose-moi mon enterrement,
Et si l’obscurité me fait tomber
Puisse-t-elle lentement me consumer..
© Jorge Vargas (traduction : Patrick Quillier)
JORGE VARGAS
Présentation :
Photographe et poète, il est né en 1990 à Armería, État de Colima (Mexique). Pueblo quieto (Paisible village), publié aux Éditions Wallâda en 2019 (avec le recueil Sang et cendres de son compatriote César Anguiano), dans l’ouvrage intitulé Cancionero des temps obscurs, est sa première œuvre poétique. Il s’y distingue déjà comme l’une des voix les plus authentiques et les plus puissantes de la nouvelle génération d’écrivains mexicains. Doté d’un regard infaillible, il s’en sert pour représenter, en images comme en poèmes, la vie et la lutte des Mexicains pour une vie meilleure.