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Accord Arcane I
Sang de moi
Étincelles de tous côtés
Dans tous mes sens
Mots désaccordés,
Peau écorchée
arrachée
Disséquer le tout.
Tout de suite.
Tu brûles
Te noies
T'envoles
T'emboues
T'ensables
T'enroules
T'écroules
Tourbillonnes et bouillonnes
Éclates de soleil
T'effaces du tableau nocturne
Griffonnes un rire de terre
Cartonnes des sons saturés
Craqués peuplés
De tous tes cafards affamés
Médites spécules cogites
Sur une pensée rescapée
À peine entamée
Et moi
Je suis là
Et je ne fais
Rien.
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Arcane VI
La nuit se vide de toute lumière
Seule
Des racines vibrent
Quelques âmes oubliées
Éloignées du temps
Surgissent.
Elle trompe l'angoisse dans un vieux rêve
Berceuse d'avant l'éveil de son silence d'enfant.
Les yeux clos
Elle pénètre dans la couleur d'une histoire.
Réécriture de la sienne
S'accorde d'être vivante
Héroïne chaque nuit
Différente.
Mais l'obscurité aujourd'hui est croissante
Pluie de sable la tire de son lit
Doucement des traces de cendre
Se répandent en vagues
Sur les chemins du papier
Une porte qui frappe
Un rideau qui s'échappe
Sursaut
Sueur
Il est là
Les regards se défilent
S'enfilent
S'abandonnent
Les paupières gonflées se ferment
Les coeurs s'arrêtent.
Personne.
Juste une voix inaudible
Taire l'histoire
Songe
Les yeux s'ouvrent
Puérilité
Recherche d'un guide qui saura indiqué la route
Recherche d'un autre pour ne pas se tromper
S'envoler
S'ignorer
Elle sursaute
Se défend
S'immobilise
Tend la main
Les corps fendent l'épaisseur du soir
Lune rouge éclaire la roulotte
Un cheval ou deux
Un morceau de ciel bleu
Des étendues rouges et jaunes
Ondulent
Ronronnent
Les roues crissent de plaisir
Crinière au vent
Paisible est la course des chevaux
Aucun mot entre eux deux
Farandole vient à eux.
Serrement de coeur
Ils ne sont pas seuls
Silence
La sève frappe les fronts
Un même son
Entoure la horde qu'ils sont
Juste pour un instant
Ils se donnent de nouveaux noms
Inconnus
Sans secret
Ils y croient en doutent
Il y a tant de choses cachées dans un prénom
Celui qu'on se donne rattrape toujours le premier
L'épaisseur de l'air ne leur permet pas de se toucher
Surtout ne rien montrer
Cache-cache de cheveux
Tonsure d'ombre sur draps blancs
Eau vive au regard brûlant
Des pierres bleues brillent sous chaque bras
Des rouges dévalent du ciel
S'enterre
Très bas.
La nuit brille de tant d'éclat
Effacer cette vision-là
Trop limpide
Trop immédiate
Trop directrice
Elle ne veut pas savoir
C'est trop tôt
Tourne la tête
Elle sait bien que pour eux
C'est trop tard
Écoute de la nuit
La farandole s'est désunie
Des fragments se sont déposés sur le lit
Cadre acacias
Faute d'acajou.
Ils ont peint les roues
Coquelicots Tournesol Indigo Cabriole
Ils ont ri
Puis se sont endormis
Il n'a plus de couche
Elle n'a plus de rouge
Ils n'osent pas se rapprocher
Vieux relent d'aïeuls
Il abandonne l'assaut
Tout a été détruit
Il sait à quel point il ne l'aime pas
Elle le sait depuis toujours
Il sait à quel point il ne pourra plus aimer une autre qu'elle
Elle ne veut surtout pas le savoir
Rature
Elle se retourne vers la marge
Regarde ce pays inconnu
Si connu
Reconnu
Repartir?
Désir si simple qu'a la feuille de rester sur l'arbre
"Mon ami
Je t'ai cherché à chaque instant
Partout
Je t'ai cherché dans tous mes temps"
"Je t'ai fui de mon temps
Chaque heure
Je me suis enfui de toi"
"Pars"
"donne"
"Mon ami
Je suis feuille et arbre tout à la fois
Étendue sur le fil de la vie
Je sens grandir un lac d'étonnement
Ne suis rien de ce que je croyais être
Ne sait rien au fond de ce que je suis."
D'un sourire il souffle les mots de sa bouche
Dans un saut il s'élance à la poursuite de son cri
L'orage a grondé toute la nuit
La pluie n'a cessé de couler
La terre bouge toutes leurs années
Elle revient dans sa maison désertée
Reprends les gestes si souvent éprouvés
Réchauffe sa gorge glacée
Regarde dans le gouffre qu'elle voulait effacer
Elle s'assoit sur le bord de sa nuit
Regarde sans ciller sa jeunesse sortir
Sent son coeur obstiné dans sa gorge
Refuser à jamais de partir
Elle sait qu'elle ne peut pas désaimer
Il le sent
Elle lui offre deux perles d'eau salée
Dans son sommeil
Puis
Elle s'en va
MURIEL CARRUPT
Muriel Carrupt, comédienne – Art-thérapeute
Écrit et illustre "Petits cailloux" et "L'amour sans fin" (ce dernier a
reçu le soutien de la Drac Haute-Normandie en 2000) édités par le
Théâtre à la Menthe.
"Ouniame et la rivière qui chante": texte, illustrations, cd.
Publie dans la revue Verso ( extrait de "robe"; "un pas dans le
monde"...). Collabore à cette revue en faisant des lectures publiques
des poètes parus dans la revue.
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