« SAISIR »
L’intrépide assaut de la langue
Sur les rives du verbe
Là coulant
A découvert
Là étrenne
Ses sons
Dans le sens exsangue
Des corps inexplorés
Plis des mots
Dans le courant
Oubliant l’oubli
Pour mille et mille
Renverses du pont aux rives
Où ils giclent sur les pierres-mémoire vive
Mais – la langue sera-t-elle
Véhiculée pierre par pierre ?
Sera-t-elle sable sans -
A chaque fois -
Viser les embouchements
D’eau prise dans le hasard
Tout souvenir y creuse
Et le vent pousse à
Leur macération
Comme
Il les porte hors
Des flux trop serrés
En les abandonnant à la diagonale
De l’instant qu’il relève
De la pesanteur
Vers
La beauté libre
D’un chant contant
Le royaume de l’oiseau
Traversant la colonne
D’un poème qu’il ensemence
De vertiges au précipice de la langue
L’écriture difficile du long désir
Revivifie le corps
Divisé – peau
Sur peau
Polissant ainsi
Les nécessités d’âme
Dans un « Encore »
A venir
Sang et poème revisités
Traversant tous les courants
Libèrent la grâce
De l’instant
Soufflé
Contre les brûlis
De la souffrance – malgré eux :
Traversant toutes les veines de l’espoir
A chaque lâché
Du verbe
Comme
Sonde
Pour
Monde
Dans toute langue
Dans tous ses rythmes –
Ses accents
Ses images
Jusqu’à la musique
Qui les accompagne
***
PAS DE TRACES POUR L’ADIEU
Au temps de cet adieu imprononçable
Sous des mottes de terre décomposable
Me mettant là complètement à nu
Je ne voudrais pas crever d’inconnu
Que le réel – rien qu’un peu - me décille
Dans mon pauvre repli – incodycille
J’y ai trouvé tant d’ailes de géant
Qui s’y déploieront – toujours – sans argent
Je traverserai des mers sans pilote
Sans les confins de la renommée
Paix – à contre courant – pour qu’à jamais
En finissent mes pensées de zélote
Ainsi – désencombré de tout attrait –
J’exploserais mon pauvre pré-carré -
Amie – ouvrant l’après du triste chant
Tu l’ouvres – florissant – tout en sachant
Lui délivrer les accents d’une veille
Qui suit le coucher d’un rouge soleil
Lames de fond d’un empire englouti :
S’insurgent – là – les larmes de l’oubli -
Je bâtis tout un monde contre l’ombre
Bien avant que ma mémoire ne sombre
Où les fleurs aquatiques à l’abandon
Flirtent avec des monstres froids abondants
Voilà donc l’échelle haute de Jacob
S’en allant hanter la belle et pieuse aube
Si proche dans sa pelure de fruit
Que s’en descend la robe de la nuit
Sous le déshabillé tremblant du jour
Où tout mon ciel appelle encore Amour -
Renaissant sous les ailes du partage -
Cette égérie unique en un mirage :
Muse délicate offrant Liberté
Sur les mille étages de la beauté
Chaque terre à terre lancé au ciel
Attrape et fait danser un essentiel
Pacte au lieu et place du toujours
Si éphémère en soit son grand parcours
Et l’adieu lié à l’amer destin
Là où s’en vont marcher tous les amants
Qui n’y épuisent pas tous leurs serments
Efface ses ruines chaque matin
Comme dans le sable s’en va la mer
****
PARIS SANS ATTENDRE
Que le temps brisure-fêlure
Raconte Ici - traverse
Les miroirs du monde
Qu’on aille à sa renverse
Au matin – sur les rondes
Dispersées par un pâle été
Et il ne nous coûtera plus
De parler – de conter
Des histoires de vigie
Rien que pour vivre
Et voir …
Plis – replis
Contre la moire
Du savoir …
Nous les rentrons
Dans l’air d’aujourd’hui –
Accomplissant des lumières anonymes
Au ras du ciel qui s’ennuie
De notre vertige
Sans bohème
Des têtes sans âmes
Jouent des solitudes dispersées
Dans leurs drames à deux sous
Qui se perdent dans
La misère
C’est en Paris
Que boit ce poème
Il n’est nulle rage
Qui le tarisse
Petit page des déraisons
Il lui offre des grâces
Hors-saison
Pour qu’il décoiffe
Les sous-fifres du mirage
Au tête à tête avec le soleil
Qui rigole en les aveuglant
De ses clins d’œil
Ces rares beugleurs
Au calcul et aux paroles
Sans passion
Bascule – Ici – l’arène
Et ses fêtes sont comme en ruines –
Désertées par un plein été
Frais comme un début
De printemps
Qui saoule
Comme Mars en Aout
Tous les mercis
Les freine
Dans des bruines soudaines
Elles bousculent la scène
Sur la place de Grève
Jusqu’à la Seine
Comme une grâce qui s’enlève
A tous les fruits
Du temps attendu sans trêve
Le bruit que cela fait
Dans le poème
C’est un silence
Pour les rassis du rêve levé
Qui ne peaufinent
Leurs fées
Qu’à perdre
Leur Paris
Un sursis pour ce poème
Qui parie pour l’ondine
Des houles – celle
Qui relève
Les foules
Pour qu’elles roulent
Bientôt avec
Le bel océan
Des rêves
Préservant tous les chemins bien en terre
ALAIN MINOD
Il se présente :
De mon nom Minod, de mon prénom Alain , on ne saurait rien dire sauf que j'essaie d'être poète, ce
qui est assez difficile, particulièrement lorsque l'on doit éviter les pièges de la renommée et de la notoriété de maître en son domaine . Mais, enfin, je n'ai été publié que deux fois : l'une,
la première aux éditions " Librairie-Galerie Racine" sous le titre auquel
je tiens : "La ville où le nulle part a lieu" . L'autre aux éditions Polyglotte, sous le
titre inchangé mais avec un sous titre : "Le proche et le lointain" . Cela en l'an 2001 puis en 2004 .
Par ailleurs , à titre anecdotique, j'ai participé à la publication de deux de mes poèmes en
1996 ( Sapriphage) et en 2012 ( Plein Sens ) . Mais je creuse la poésie depuis longtemps,
exactement depuis que j'ai partipé à un groupe d'intervention surréaliste dans des foyers de
jeunes travailleurs en 1968/69 . Depuis je me suis donné une formation philosophique et
littéraire en passant par l'université . A cela s'ajoute une longue expérience du slam , de ses
débuts en France jusqu'à tout dernièrement . Etant, relativement solitaire , j'éprouve le besoin de participer aussi , avec des amis, à des soirées poétiques . Mais ces expériences sont très
espacées dans le temps . J'estime, cependant qu'elles sont indispensables pour qui veut "experire" avec et en compagnie de la poésie malgré ces temps obscurs , temps d'un "nouvelle détresse",
celle de la pensée .