L’HEURE N’EST PLUS L’HEURE
Mêmes lieux, même lumière.
La voix à côté : on peut
la comprendre. Mais non. Une autre
parle plus près. On l’écoute.
Le silence est plus profond.
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La neige comme une métaphore.
Dans les yeux, des mots se pressent.
Les énumérer ne sert à rien.
On dit quand même : bol, gel, pied.
Que voit-on qu’on ne voit pas ?
Que voit-on dans le jour bas ?
L’attente est blanche. On se serre
entre hier et demain. Ici
dans un instant de doigts froids.
Le présent est sans visage.
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Le peu qu’on entend des voix
est un chemin vers ce qu’on
ne sait pas. La main se pose
sur la main. Les choses perdent
leur nom. L’heure n’est plus l’heure.
JACQUES ANCET
Extrait de Voir venir, laisser dire (inédit)
Jacques Ancet est né à Lyon en 1942. Il est l’auteur d’une trentaine de livres (poèmes, romans, essais) dont, récemment, Comme si de rien, L’Amourier, 2012, Chutes IV, Alidades, 2012, Portrait d’une ombre, Po&psy, Erès, 2011, La Tendresse, publie.net, 2011, Chronique d’un égarement, Lettres Vives, 2011, Puisqu’il est ce silence, Lettres Vives, 2010, L’Identité obscure,Lettres Vives, 2009, Le Silence des chiens, publie.net, 2009, L’amitié des voix, publie.net, 2009 — Prix Charles Vildrac de la SGDL et prix Heredia de l’Académie Française, 2005, Prix Apollinaire, 2009. Auteur également d’un soixantaine de traductions dont, entre autres, des versions de Jean de la Croix, de Gómez de la Serna, de Cernuda, Valente ou Gamoneda, il vient de publier deux anthologies, l’une de Jorge Luis Borges, La Proximité de la mer, 99 poèmes, Gallimard/Du monde entier, 2010, l’autre de Francisco de Quevedo Les Furies et les peines, 102 sonnets, Poésie/Gallimard, 2011 et Lettre ouverte suivie de Sous la pluie étrangère,de Juan Gelman,Caractères, 2011 — Prix Nelly Sachs 1992, Rhône-Alpes du Livre, 1994 et Bourse de traduction du Prix Européen de Littérature, 2006.