UN TANGO POUR NAPLES
(à paraître)
-1-
Oui, le tango est un soliloque,
Quand, seul, on parle pour deux.
Il est ce personnage qui s’évanouit
Dans la brume sans faille de Trapani
Pour s’éterniser dans la pluie de Buenos Aires.
Le tango est une suspension du temps
Entre l’aïeul et l’ailleurs,
Entre l’errance et l’aisance.
Son pas hésite entre la fuite et le retour,
Entre le hurlement et le cri.
Le tango d’ici crève le jour,
Entre la trombe d’eau de Stromboli
Et les dédales des tambours d’Istanbul.
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-2-
Le tango décolonise le parfum de l’homme sur le quai.
Il intègre le passé au présent de son itinéraire.
Il raconte les retours avortés, les départs manqués,
Les traversées où le silence ressemble à un phare
A la limite des pays dessinés un jour de pluie.
Qui a dit que le tango soude la plainte à la mélancolie ?
Le tango est ce mot qui relie un port à un autre port,
Comme on porte laminaire à madrépores.
Le tango passe du rail à la passerelle,
Il relie l’entrepont à un autre pont.
Il est espace en fuite entre deux corps
Qui migrent seuls, en caravelles perdues,
Au cœur de l’océan des premières solitudes.
KHAL TORABULLY
Auteur d'une vingtaine d'ouvrages, et concepteur
de la coolitude, poétique reliant les Indes et les imaginaires du monde, ouvrant la voie à des créations et études entre les civilisations et les migrations des engagés, notamment.
Lauréat de Lettres-Frontières (Suisse).
Prix du Salon du Livre insulaire 2000.
Nombreuses anthologies.
A aussi réalisé 6 documentaires, dont le dernier a reçu le Golden Award au Caire, 2010.