Durant ces heures lentes
Où framboise à ma bouche
et framboise à ma langue
sucre sirop sucré coule à la commissure
et framboise à ma main
vibrante et chaude amie dans ma paume- enchâssure
au milieu des soupirs
oh je t’ai dégusté
Et ma bouche aux framboises
Oh je t’ai savouré
J’ai léché j’ai mordu je t’ai bu et aimé
Framboise à mon palais
***
Pluie, ville et brume
L’averse allume
Par la fenêtre ouverte
Le rideau des pelouses
Et le silence...
Et le silence ceint la pièce d’un suaire
Un chuchotis tremblé semble froisser son aile
un friselis à peine, un chuintement si doux,
Qu’il en fait frissonner l’arceau de notre abri
Caresse en sourdine
sur ma peau palpite
Une eau baladine
à mon cou crépite
Profonds soupirs… et ce silence…
et le silence gris descend comme une onction
- Crépitement pointu de l’eau sur le bitume
C’est ma jeunesse enfouie qu’à pleine âme je hume
C'est l'odeur de mes rêves blancs à faire éclore
C’est la vapeur des ifs au pied du mont Thabor.
Que sais-tu de la pluie toi qui frôles mes courbes ?
Peut-être es-tu celui qui retires la tourbe
Au vin noir de la nuit ?
et le silence gris
étire ses dix voiles
puis se pose alentour
car sache mon ami
qu'à l'heure où tu noircis
nos portées de frissons
j'entends
la pluie
***
Qui prendra pitié d’elles,
ces femmes, dont les hanches prodigues
chaloupent d’indolence
le long des chemins secs
pour ramener de l’eau à l’heure du réveil
pour ramener de l’eau à l’heure du sommeil
ces femmes, et leur maintien prudent de hérons des marais au milieu des serpents
Qui prendra pitié d’elles ?
Qui prendra pitié d’elles,
Elles, femmes Congo
Femmes du pays aux trois fleuves ? :
Femmes de l’est et des collines – la luxuriance sous vos pieds
Miserere
Femmes du sud, lente savane – pas lent des zèbres et des buffles
Miserere
Femmes du nord dans les forêts – les houppiers verts, vos parasols
Miserere
Femmes de l’océan à l’ouest - vous qui reprisiez des filets
Miserere
Je pleure vos larmes rentrées
Votre courage de victimes
Pleurent vos sexes mutilés
Et ces cris sortis de vos bouches
Les cris de vos vagins ouverts ensanglantés :
Ils m’ont violée
M’ont déchirée
Et tailladée
M’ont perforée
Balles et clous
M’ont entaillée
Acide en moi
Un pistolet
Ils m’ont violée
Ils m’ont tuée,
tout le jour et la nuit, oui des jours et des nuits, de l’aube crue au noir minuit
Armée de l’ombre, un cauchemar, oh une horde – c’étaient mes frères
Ils m’ont violée
Sous le volcan
Au bord du lac
Ou à l’ombre d’un bananier
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Pendant qu’il profanait son corps, elle écoutait geindre un pluvier
LOUISE CASTELMIO
Son blog : La plume de Louise .