Forêts qui portez tout
sur des Tableaux de Marc Chenaye
Forêt primitive
Elle nous conduit
jusqu'à ce que nous sommes
S'en souvient-elle
de ce long silence après l'orage
de cet embrasement ultime
entre le gel et le feu
Des nuits anciennes
avant le verbe avant les maux
avant même que l'homme ne prenne racine
**
Forêt de chair indomptable
Ici
rien n'est tout à fait mort ni tout à fait vivant
Parfois
Je cherche et guette
le moindre bruit du vent
Quand le ciel est noir
que la lune s'éclipse
Je songe à l'infini
de la forêt immense
Le calme est tel
qu'un chant y résonne
Un oiseau sur la branche
se pose s'envole puis disparaît
**
Forêt Impénétrable
Plus je m'en approche
plus je m'en éloigne
Trop faibles sont mes pas
et je porte avec peine
Tout le poids solitaire du voyageur
Moi qui n'ai de souci
que de flâner d'un pas tranquille
Suivre
le cours d'eau du ruisseau
M'enfoncer et me perdre
dans les méandres de la forêt profonde
**
Forêt éphémère
Son souffle emporte tout
bien avant que la flamme
ne s'éteigne avec l'aube
Au loin
s'étend un horizon confus
de sève de cendres et de larmes
On dit
que l'absence n'est qu'une illusion
si la parole demeure
et propage son chant
J'attends dans la nuit
une éclaircie qui ne vient pas
Entendez-vous bramer le cerf dans la forêt qui gronde ?
**
Forêt carnivore
Chaque nuance
amplifie le rythme
Au gré du vent
la colline immobile
se prosterne dans les muscles du temps
Ici ce n'est
qu'un chevauchement de désir
Bouches dédoublées à l'infini
sous la morsure des strates
avant le baiser des veines assassines
Un territoire de peau incandescente
dans le vacarme des forces sismiques
**
Forêt captive
Il faudrait
d'un seul regard
entrevoir la plaine
retranchée dans ses quatre coins
entre le gris du ciel
et cette terre d'argile
qui court vers la forêt profonde
où nul homme s'invite
Ici où là
émergent d'énormes rochers blancs
si ce n'est quelques feuillages
rouges et mauves
égarés aux pieds des grands arbres
qu'un incendie menace
comme peau de chagrin
Pourtant
la nuit, tout près
j'entends le bruit du torrent
sur la pierre qui roule
annoncer le printemps
**
Forêt perpétuelle
Les vapeurs de l'étang
ont la couleur du ciel
De l'arbre en fleurs à l'arbre mort
quelle distance nous sépare
La mousse colore
le printemps des pierres
alors que les feuilles mortes
recouvrent déjà tout un désert de ronces
Le fleuve est sombre
et la pluie va tomber
Ne pas sombrer au creux de la vague
que porte le vent qui se lève
Seul sur ma barque de passage
je songe
et regarde un nuage
qui s'enfuit au loin
**
Forêt de lumière
Tu dis neige !
Un rouge soleil
recouvre la roche qui se dérobe
On distingue à peine
un dernier nuage
dans sa quête perdue du ciel
Fleuve qui se prolonge
au travers des gorges profondes
Au loin
un chemin nous emporte
avant que le soir nous rattrape
au pied de la montagne noire
Je vais, je viens
mais sans laisser de traces
****
You forests who bear all
Painting by Marc Chenaye
Traduction anglaise de John Batey
Primitive forest
By which we are led
until we are
Does the forest remember
this long silence after the storm
this final blaze
between frost and fire
Those primeval nights
before the word before sin
before mankind even took root
**
Forest of dauntless flesh
Here
nothing is utterly dead nor utterly alive
Sometimes
I search and listen for
the merest sound of wind
When the sky is black
when the moon is eclipsed
I dream endless dreams
of the immensity of the forest
the calm is such
that a song rings out
a bird on a branch
alights flies off then disappears
**
Impenetrable forest
The more I close in
the more I distance myself
My steps are too weak
and I suffer
All the lonely weight of the traveller
I whose only care
is to stroll with lazy tread
To follow
the course of a stream
To push deeper in and lose myself
in the labyrinth of the forest depths
**
Ephemeral forest
Its breath bears all away
long before the flame
dies with the dawn
Far off
stretches a veiled horizon
of sap of ash and of tears
It is said
that absence is but an illusion
if the word remains
and spreads its song
I await in the night
a brightening which fails to come
Do you hear in the rumbling forest the stag’s gruff call ?
**
Carnivorous forest
Every nuance
amplifies the rhythm
At the whim of the wind
the unmoving hill
prostrates itself in the muscles of time
Here it is but
a straddling of desire
Mouths endlessly split asunder
beneath the bite of strata
before the kiss of grain bled dry
A territory of incandescent skin
in the tumult of seismic forces
**
Captive forest
One ought
with a single glance
to glimpse the plain
huddled in its four corners
between the grey of the sky
and this earth of clay
in its dash towards the forest deep
where no man chooses to go
Here or there
emerge huge white rocks
unless simply a few leaves
red and mauve
strayed at the base of mighty trees
which a blaze threatens
to crumble away to nothing
However
in the night, so close
I hear the sound of the torrent
on the tumbling stone
announce the coming of Spring
**
Eternal forest
The vapours rising from the pond
are the colour of the sky
From the tree in flower to the tree in death
so great the distance which divides us
Moss tinges with colour
the springtime of the stones
whilst dead leaves
already blanket a bramble waste
The river is gloomy
and the rain will soon fall
Take care not to founder in the trough
of the wave
borne on the rising wind
Passing through alone on my craft
I daydream
and watch a cloud
flee away far away
**
Forest of light
You said snow !
A red sun
blankets the irresolute rock
One can barely make out
a final cloud
in its quest but lost in the heavens
River which unfurls
through many deep rifts
In the distance
a track bears us away
before being caught by the evening
at the foot of the black mountain
I come and I go
with no trace left behind
RICHARD TAILLEFER
Richard Taillefer, poète revuiste. Cofondateur de la revue Poésimage (France).
Né un 21 avril 1951 à Montmeyan. Un de ces magnifiques villages perchés du haut Var situé au pied des Gorges du Verdon.
Fils d'un traminot, il passe toute son enfance et son adolescence à Marseille où il crée à l'age de 16 ans avec quelques amis, le Montmeyan club. Une association de jeunes, dévoués à la danse (les boums) et aux musiques branchées des Années 1970.
C'est le temps des premiers textes poétiques et des amours aux pieds des jeunes filles diseuses de bonnes aventures.
En 1972, après une année passée dans le cadre du service militaire obligatoire, il rentre à la SNCF comme conducteur de train, dépôt du Charolais, situé à Paris et ce jusqu'en 2001.
Période de militantisme syndical. Elu à plusieurs reprises délégué du personnel.
En 1981, il s'installe à Savigny-le-Temple, ville de 30 000 habitants de la Seine-et-Marne où il y assure la présidence de la maison de la culture (Espace Prévert) de 1993 à 1998, puis la fonction de maire adjoint délégué à la culture en 2001.
Membre du Parti Socialiste dès 1985, Richard Taillefer sera tour à tour, secrétaire fédéral PS de Seine-et-Marne, aux entreprises,au social, à l'agriculture, à la culture.
Membre du bureau national du secteur Entreprises du PS dans les années 2000.
Candidat aux sénatoriales comme suppléant sur la liste de gauche du 77 en 2004 ainsi qu' aux régionales d'Iles de France en 2010.
En 1977, il publie son premier recueil de poésie (Combat pour un amour), ce livre sera suivi de 7 autres:
Ombre et lumière/1979/Cahiers Froissart
Litanies pour quatre saisons/1981/Cahiers Froissart
Au rond-point des falaises/1994/Cahiers Froissart/Prix Froissart
Corps de papiers/1991/La Table Rase
En un clin d'oeil/2009/Patrimages
Jusqu'à ce que tout s'efface/2010/ Editions Dédicaces
Des clins des mémoire/2011/Editions Dédicaces
Richard Taillefer a collaboré à de nombreuses revues:
La Sape,Décharge, Cahiers Froissart. Poésimage, Comme en Poésie, Jointure,
Patrimages, Capital des mots, Intuitions, Les Cahiers du Charbon Blanc, la Grappes
Dans le cadre de la revue Poésimage, il réalisera des entretiens et portraits
de plasticiens: Emile Sabouraud, Henri Goetz, Bengt Lindström, Edouard Pignon,
Patrick Lipski, José Pédros I Ginestar...
Invité au salon du livre de Montréal en 1985 dans le cadre de l'OFQJ, 15 jeunes Editeurs viennent saluer le Québec.
Lors de cet évènement, rencontres avec les poètes Gaston Miron, Claude Beausoleil, Patrick Straram (Le Bison Ravi),Marie Belisle, Hélène Dorion, Lucien Francoeur, Bernard Pozier, Madeleine Gagnon, Yves Boisvert, Célyne Fortin et le photographe Serge Mongrain.
De ces échanges, naîtra "RENCONTRES QUEBECOISES' publié dans la revue Poésimage.
Richard Taillefer a participé à quelques anthologies poétiques:
- 114 Poètes sollicités par de jeunes collégiens du Nord/éd.Haut de France
- Poètes pour Haïtï. (textes nés du tremblement Haïtien sans nom) http://secourspoétique.net
puis aux Editions de l'Harmattant
- Spécial Haïtï/revue Intuitions
- Anthologie 2010 des Editions Dédicaces
- Ombre et lumière, anthologie du festival international de Poésie de la ville de Morestel...
Vous pouvez retrouver des textes de Richard Taillefer sur les liens:
Richard Taillefer wikipédia
http://patrimages.over-blog.com
Richard Taillefer sur Facebook
http://www.myspace.com/poesimage
http://www.printempsdespoetes.com/