SIX PIEDS SUR TERRE
(I)
PAYSAGES
chercher un silence ouvert
sur le monde
regard fixe
braqué sur le passage
l’œil en grand écart
*
Paysage I :
désir de rivage, dans la masse, tailler un espace aux vibrations mélodieuses d’où le bleu pourrait s’échapper
puis, lâcher prise
l’esprit en cavale sur ces étendues impénétrables
en l’absence d’ombre, changer de point de vue
l’observatoire : un pas sur le côté
dans la plaine : bruit braiment bramement et autres anecdotes
perdition dans la forêt, effrayée, trois petits points en guise de repère, comme un jeu désinvolte
(...)
(IV)
IL
Déroutes et des hommes
lui :
traînée de parfum, yeux exorbités, gravitant
lui :
fantôme collé sur la rétine de mes yeux
lui :
saveur évaporée, sur le bord de ma langue
*
on lit, à travers sa bouche
les mots macérant
la langue mal pendue
le palais aux mille et un mensonges
on lit, à travers ses mains,
les caresses oubliées
les scarifications malignes
(...)
(V)
PENDANT CE TEMPS
Pendant ce temps...
Le monde, 02/05/2009
la pandémie est imminente
état d’alerte
le premier rayon de soleil de la journée se pose sur la surface de l’eau, l’a troublant, légèrement
au coeur de la crise sociale qui secoue la France
la rivière rejoint l’océan, se jettera dans ses bras. perpétuelles retrouvailles
l’investissement chute, la récession s’aggrave
lui écrivait, tout bas, qu’il aimait, simplement ému par la vision fugace d’une femme, qui passait, là bas, au large de l’anti-cyclone
attentats, 56 morts – soldats, 9 tués – militaire – lutte – narcos
elle se transforme en ombre, enfouie bien malgré elle dans ses rêves. voulant oublier, elle se fit plus présente. jusqu’au jour où elle cessa de rêver
neufs soldats turcs tués par une mine dans l’est du pays
l’arbre, esseulé, se mit à perdre ses feuilles. une à une. tapissant le bitume de couleurs mordorées. puis, il fut nu. puis, il fut tronçonné
6500 sri lankais sont morts sans qu’aucun cadavre apparaisse à la une des journaux
en apnée, quelques années durant, à la recherche du trésor abandonné ou de la bouteille à la mer, archéologue de la détresse. puis, au gré des courants, il cherche l’île (elle ?) où s’échouer
(...)
(ayant fait l’objet d’un livre d’artiste)
SÉCRÉTION
chienne de mort
putain au long cours
accrochée au balancier
pied de nez – elle se trémousse
derrière ton dos
-alerte !
allégresse – nappée de sang gluant,
ne plus prononcer le mot – la langue dans le trou
chienne de vie
qui pactise
ÇA, rue dans les brancards
ÇA, pue dans les placards
aux secrets bien rangés
aux histoires bien pliées
à l’odeur de naphtaline
termite
ÇA, me dévore
les cols rigides
les nœuds de mouchoirs
les linceuls
les draps tachés
de foutre fantasmé
j’exècre le vide, le néant,
les puceaux aux mains trop blanches
l’orifice de la naissance
ÇA, cure les bas fonds
ÇA, racle
ÇA râle
la marée noire,
(...)
VÉRONIQUE SEZAP
Photographe /plasticienne (cap Photographie + 1ère année licence art plastique), l’écriture et le langage ont toujours été présents dans mon parcours.
(En 2006, j’ai créé les éditions Mona Kerloff , éditant des livres d’artistes).
Deux recueils de mes textes « Opus » et « Mona 356 » sont parus aux éditions Fibres Libres et aussi , des photographies et des oeuvres sur papier ont accompagné des écrivains pour leurs livres : « A quoi rêvent les statues » avec Daniel Kay aux éditions La Part commune et « Dans l’unique visage du vent » avec Serge Torry aux Edt Chemins Bleus.