Le Capital des Mots.

Le Capital des Mots.

Revue littéraire animée par Eric Dubois. Dépôt légal BNF. ISSN 2268-3321. © Le Capital des Mots. 2007-2020. Illustration : Gilles Bizien. Tous droits réservés.


LE CAPITAL DES MOTS- PATRICK BEAUCAMPS

Publié par ERIC DUBOIS sur 2 Décembre 2014, 11:42am

Catégories : #poèmes

La clé


 


 

La clé de la maison.

La clé que j’ai reçue pour mes onze ans.

La clé qu’il ne fallait pas perdre.

La clé qui devait pendre au crochet.

La clé que j’ai bien cru avoir perdue.

La clé que les locataires m’empruntaient.

La clé qui m’accompagnait jusque l’internat.

La clé de leur maison.

La clé qui ne demandait qu’à s’échapper.

La clé salvatrice de mes nuits d’ivresse.

La clé dont je ne voulais plus entendre parler.

La clé qui n’entre plus dans la serrure.

La clé que je n’ai jamais perdue.

La clé qui ne pend plus.

La clé sans maison.

 

***

 

Floche


 


 

Nous emmenons notre fils

à sa première fête foraine.

Je l’installe sur le carrousel

et remarque qu’il n’y a plus

de floche !

Un coup d’œil rapide

aux alentours m’affranchit.

Plus de pommes d’amour

tenues par les amoureux.

Plus de barbes à papa

maculant les joues des enfants.

Plus de blousons en cuir

bravant les auto-tamponneuses.

Plus de ballons perdus

s’évaporant dans le ciel.

Même les chevaux de bois

ont disparu du tableau

que je gardais en mémoire.

Ma femme me tend un croustillon.

Nous soufflons sur mes souvenirs.

 

***

 

Qu’en dira-t-on


 


 

J’attends le dernier train.

Sur le quai, une femme sanglote.

Je m’approche de l’aubette et vois

ses yeux rougis par les larmes.


 

Les sillons de rimmel escortent le passé.


 

Fréquemment, avant de partir quelque part,

la maison tremblait de la cave au grenier.

Des larmes coulaient sur les joues de l’enfant

mais il devait les sécher sur-le-champ.

Passer du chagrin à la gaieté.

Ne rien laisser paraître sous peine

d’en découdre par après.


 

Le train entre en gare.

Elle ne bouge pas d’un iota.

A travers la vitre je vois que

ses peines éclatent à nouveau.


 

Certaines arborent leurs faux sourires.

Certaines se vissent des lunettes de soleil.

Certaines vous disent qu’il ne s’est rien passé.

 

 

PATRICK BEAUCAMPS

 

 Né en 1976 à Tournai (Belgique), Patrick Beaucamps a grandi dans un milieu modeste et exercé plusieurs métiers : ouvrier imprimeur, magasinier, employé de vidéoclub, cheminot, bibliothécaire.

En 2003, après plusieurs déménagements à travers le pays, il s’installe dans sa région natale et publie son premier ouvrage : Le Bruit du Silence.

Poète et nouvelliste, son travail parait aux éditions Chloé des Lys et dans diverses revues littéraires.

  

 

Aux éditions Chloé des Lys

* Le Bruit du Silence, Poèmes (2003)

* 200 ASA, Nouvelles (2005)

* Tant d’eau sous le pont, Poèmes (2013)

* Brasero, Nouvelles (2014)

* Quand les vagues se retirent, Poèmes (2015)

 

En revues

* Le Journal des poètes (N°3/2012)

* Incertain Regard (N°9/2014)

* 17 Secondes (N°5/2014)

* Lélixire (N°9/2014)

* Traversées (N°74/2014)

* Le Capital des Mots (Deuxième semestre 2014)


 

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B
j'aime beaucoup l'évocation de la clé... elle me touche..
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