Six sonnets des Oiseaux
(Tirés de Mélaniques, Journal diffracté – ouvrage en cours –)
Clément G. Second
CLINS
Nuances des oiseaux
Signes inimitables
Quand le plumier s’ensable
Leurs clins – rumoroso –
Entrouvrent des rideaux
D’air aux rives trop stables
Faisant rêver la table
En vue de hauts plateaux
De visées graduelles
Cimes éventuelles
Aux à-coups de bonheur
– Plus tard quand ils se posent
À la clarté mi-close
S’en remet leur teneur
RELEVÉ RELÈVE
Des migrateurs ont piétiné ici
Entre deux vols du long pèlerinage
Bientôt la mer aura fait son lissage
– Ainsi des mots Des noms aimés aussi –
On lit aux doigts hâtifs bien que précis
Qu’ils n’ont pas eu le bel atterrissage
Car la tempête étriquant les passages
A fait oser de violents raccourcis
Ces quelques-uns ont partagé une aise
Petite et drue sous le fil des falaises
Pour se garder dans le jour finissant
Puis s’ébrouer quand le matin se lève
Et – faisant corps avec le bleuissant
Vent gris – signer Absents de cette grève
PART DU DÉPART
Insistant le cours
Du vent sous les portes
Les matinées tortes
Les guide le jour
L’oreille aux parcours
Que l’oiseau rapporte
Le silence escorte
Un secret discours
Des sept sens à l’âme
Qu’est-ce qui réclame
L’empennage humain
Approcher l’énigme
Sur un mode infime
Sans clair lendemain
DANS LA FUTAIE
L’oiseau seul et non esseulé
D’appel en appel se déplace
En silence et mal décelé
Toujours ailleurs que dans ses passes
D’un son à peine modulé
Il ne chante guère Il délace
Ce qui aime enfin s’écouler
Dont le gué du feuillage a trace
Qui se tait bien bas l’entrevoit
D’une oreille intime qui boit
Et ses manifestations brèves
Et le courant sourd qui jamais
Ne tarit ni ne s’en remet
Au gré inventif de ses trêves
PROPRE DE L’OISEAU
Sur tous les silences
Poignants ou blasés
Soudain décroisé
L’oiseau qui s’élance
Et qui se balance
Tout extravasé
Dans l’air pavoisé
De vents de relance
Peine tenue loin
Quel que soit le soin
De ses non-remèdes
Comme à tout jamais
S’enhardit la paix
Mieux qu’ un intermède
UN PASSEREAU
Celui qui se taisant s’annonce
Sur la fuite inclinée des champs
L’écouter mieux sans les réponses
Que délivrerait le penchant
Analphabète de son chant
– Solfierait-on parmi les ronces
Ou vers la cime à ciel touchant
Ce que sa beauté fluide énonce
Se scellerait sur lui l’ailleurs –
On est profond de sa faveur
Car s’il se tient de marge en marge
Espacé mélodieux songeur
C’est en discret émulateur
Notule introduisant au large
CLÉMENT G. SECOND
Clément G. Second
Écrit depuis 1959 : poèmes (des sortes de haïkus qu’il nomme Brefs, sonnets, formes libres), nouvelles, notes sur la pratique de l’écrit principalement. Quelques communications artisanales à diffusion confidentielle.
Fréquente littérature, arts, philosophie et spiritualité.
A commencé à collaborer à des revues (Le Capital des Mots, La Cause Littéraire, N47, Terre à Ciel, Harfang, bientôt Paysages écrits…) depuis fin 2013 par besoin de plus d’ouverture. Partie prenante de L’Œil & l’Encre*, blog collectif photos-textes à l’initiative de la photographe Agnès Delrieu ( le montage de ce blog déjà visitable se poursuit).
Se sent proche de toute écriture qui « donne à lire et à deviner » (Sagesse chinoise ), dans laquelle « une seule chose compte, celle qui ne peut être expliquée » (Georges Braque), et qui relève du constat d’Albert Camus : « L’expression commence où la pensée finit ».
a1944@hotmail.fr
* http://agnesdelrieu.wix.com/loeiletlencre