ELEGIES A LA FEMME DE L’AUTRE
le vin,
tournoiement de lueurs,
entrouvre une porte
où les lèvres s'avouent
ce que tant de mots taisent.
(Jeudi 30 janvier 1992, PARADIS LATIN)
.............................../........................................
L'instant évanoui
crispe la main;
la route redémarre.
Et le rock coule,
glissando inlassable .
Le bleu des gyrophares
sème les trouées d'arbres
d'exordes inquiètes.
Demain, nous le savons;
oui, demain, nous mourons.
Non plus de notre mort,
mais de point être nous.
Opportune, à rebours,
une excuse naîtra
pour conjurer nos craintes.
Et nous nous bénirons
d'être enfin devenus
de sages adultes
courant à reculons.
(Mardi 17 Mars 1992 )
....................../.................................
L'oeil hésite à l'orée
d'un paisible mirage.
La main glisse, évincée,
sur l'ombre à l'étiage.
Hors que ne puis-je nier
tant ton regard me scrute?
Regain, augure ou lutte ?
Psautiers et credo clos
la soie de ton corps hante
l'éveil de mes chaos
et comble mon attente.
L’esclave, horde aux abois,
de massacrer se targue.
Seul le prêchant argue
ses insipides fois.
Dors ! Créée sous tes doigts
notre bible les nargue.
(Dimanche 22 Mars 1992, JAZZ)
........................./..............................
L’obstacle s’accroît.
Quel dieu lucide
tisse nos floraisons
d'expertes litanies?
Sourd, courte, des engins,
l’absconse épithalame
que nul soleil d'été
ne dissipe.
Patience floue
d’un regard épousé
puisant sa dîme
au creux remuement
des saynètes et des rues.
L'impossible présence s'impose,
brocardant nos mémoires.
Conquérants en déroute,
nous refermons les yeux,
chassant nos songeries
pour nous croire vainqueurs.
.............../................
Insistance des jours,
l'heure élue prime l'œil
et forclos nos projets.
L’oubli,
le bruit,
l'avers.
Quoi ? Sinon un éveil ?
Subsiste, hors champ, la trace.
Notre errance l’arase.
....................................../.......................
Plus absolus qu'un pourcentage,
les volets clos des maisons corses
authentifient l'exil d'un peuple.
Irréversible absence au gré
des aléas d'une imposture?
ou rémission comme un regret?
Orant, un jardin sentinelle
pour quel gage et quel repentir?
broussaille en espérant l'été,
quand jouent renégats et parjures.
............................. /........................
Guide en toi une vague,
ploie sous le vent.
L'oeil, tisonnier ou dague,
mande un amant.
La main s'excuse, il meurt.
Et notre dos s'érige,
tel un pardon .
Griffe, mi -f i 1 mi- heur,
demeure un fin vestige
de l'abandon.
(Mai 1992, Canari )
........................../..............................
L'immarcescible ébat
des rochers et des vagues
cisèle et broie nos songeries.
Nu lors, pour quel combat?
le corps fourbe divague
ou noue ses courbes assoupies.
Le premier chant réclame,
héraut des lois, la route .
Orant matin de l’âme,
l'oeil l’alluvionne. Absoute,
veille de gisants noirs,
fertile orbe des proues,
vacarmes reposoirs,
torves guipures floues.
Quoi, sinon le rien,
accouche un drame au loin
et se dissout, fait homme ?
(Mai 1992, CORSICA)
................................./........................
Quand, le basculement ;
Si dire non s'impose?
Clef de quelle effraction,
Le premier pas franchi,
promulgue nos déroutes.
Délivrance ou débâcle,
en la parole effleure,
bouffon, l'irréparable.
Peu de mots l’accompagne.
Tout agonise alors,
jusqu'à notre tendresse.
Et le silence encore
est préférable aux mots.
(18 Mai 1992, Paris)
.................................../........................
Le vent sur les volets
crible nos rêveries .
Une main sans soutien
jette les osselets
et le dé, guerrier las,
clame son chiffre: Un !
Le corps autre s'endort
abdiquant nos mémoires.
Joker sur l'échafaud,
nous prions qu'une donne
annule le sentence.
(12 Novembre 1992, Montpellier)
............................./.......................................
Sans toi s'exhume
une infinité de complots
que l'instant pétrifie.
Naissent les insomnies,
virevoltent les mots;
une absence nous lie.
(3 Janvier 1993, AIACCIU)
ANGE-MATHIEU MEZZADRI
Plus d'infos : http://data.bnf.fr/12300142/ange-mathieu_mezzadri/