Poètes
vie lamentable des poètes
je pense à toi Desnos
par le typhus embrassé
et vous Baudelaire aphasique
Nerval sous la lanterne
et Villon en grand danger
d'être pendu
mais piètres plus encore
poètes en la foule perdus
grouillent nos villes
et métros emmènent
d'anonymes poètes
à la plume abolie
***
prédateurs que mangerez-vous
vous semblez si insouciants
vous promenez votre frimousse
et votre queue de par le monde
que les peuples flambent
que vous importe prédateurs
Olympes sont vos plaisirs
l'air n'est pas le même sur vos cimes
pureté des lignes vous est costume si rigide
par temps clair il fait si beau parler
prédateurs pourrissent vos proies
aucun relent ne vous pince le nez
l'ordre n'a pas d'odeur
qu'il règne les foules s'y plient
les oiseaux tournent au ciel
votre approche effraie la volaille
valetaille songez-vous en vous-mêmes
vous avez tant décimé le parc
qui vous ferait confiance encore
prédateurs que mangerez-vous
le ciel est un refuge
votre gueule n'est pas si grande
l'Azur échappe à vos crocs
tournent au ciel les oiseaux
tournent tournent les oiseaux
là-haut bien loin de vous
tournent merles et corbeaux
fatigue leur est le vol
tournent et tant s'épuisent
qu'à la fin tombent
Inventaire supplémentaire, 14
***
34
c'est là alors qu'elle vit
où l'on ne va jamais
ailleurs de clarté
notre ombre n'y est
à rebours sa beauté
fleur qui renaît
les rêves
comme dans un rêve
nous la montrent
les allées ombragées
on les suit
on suit les autres
ne se retournent
nos nuits
amertume au comptoir
qui peut comprendre
sans mur du son nos cris
paradis dans le passé vivent
à rebours le chemin
y entrer
impasse
Impasse de l'amour, 34
***
D'après Sappho (fragment 44)
Orage tombé sur mon âme,
Comme descendu des montagnes
Sur une forêt de chênes,
Amour.
GEORGES OUCIF
Il se présente :
Georges Oucif a vécu au Sénégal, au Nicaragua et dans l'Atlas marocain. Aujourd'hui, il vit à Paris. En 2013, il a publié, aux éditions de la Galerie Talmart, Inventaire, un livre d'artiste réalisé avec le peintre Antonin Salsmann pour les oeuvres duquel il a écrit des textes poétiques. Cette publication a été l'objet d'un événement lors du Printemps des poètes. Il a réalisé, en 2006, un documentaire sur Marie Darrieussecq, Tristes Pontiques, Marie Darrieussecq traduit Ovide. Il a publié chez Gallimard une traduction de La Guerre des Gaules de César et, avec Abdellah Khallouk, Le Chat enrichi, un recueil de contes berbères du Maroc paru chez Publisud. Il a aussi publié de la poésie et des photos dans la revue Arlu. Il collabore à la revue Riveneuve Continents.