Le Capital des Mots.

Le Capital des Mots.

Revue littéraire animée par Eric Dubois. Dépôt légal BNF. ISSN 2268-3321. © Le Capital des Mots. 2007-2020. Illustration : Gilles Bizien. Tous droits réservés.


LE CAPITAL DES MOTS - NOELIA ILLÁN CONESA

Publié par Le Capital des Mots sur 22 Juillet 2017, 06:04am

Catégories : #poèmes

DESCONCIERTO

Hombre astuto

que erró mucho tiempo…


 

Homero


 


 

Reconozco a veces mi vida en algunos sitios.

El café, un cigarro, una taza agradable.

Las Mezquitas me tuvieron dentro,

me perdí en las calles del Bazar.

En Nueva York tengo ropa en la tintorería,

veo caras conocidas en el barrio de Termini,

tratos familiares en Alexander Platz.

A veces, perfecta realidad. Otras, abismo.

Otras veces, sólo soy real en Cartagena.

Y esa sensación me asfixia.


 

DESARROI

Homme rusé

qui erra longtemps…


 

Homère


 


 

Je reconnais parfois ma vie dans certains endroits.

Le café, un cigare, une terrasse agréable.

Les Mosquées m’ont accueillie,

je me suis perdue dans les rues du Bazar.

A New York, j’ai du linge au pressing,

je vois des têtes connues dans le quartier de Termini,

des relations de famille à Alexander Platz.

Quelques fois, parfaite réalité. D’autres, abîme.

D’autres fois, je ne suis réelle qu’à Carthagène.

Et cette sensation m’étouffe.


 


***


 

¿Y SI NO TE ENCUENTRO ?

Justo en ese minuto

cuando nos escapamos

al mejor de los mundos posibles


 

Gil de Biedma


 


 

Búscame en el salitre del mar sureño,

en la línea que separa de la tierra el cielo,

en los libros gastados de París

o en el ocaso rosa de Pest.

Búscame en la abstracción del tiempo,

en el merodeo de aquellas casas de oro,

en las sombras del almendro en flor.

Búscame en las manos asoladas de mi abuela,

en los sombreros de copa,

en las tumbas de un cementerio tunecino.

Búscame en las huellas de los perros

y en el relamer nocturno de Marruecos.

No me busques aquí.

No estoy.


 

 


 

ET SI JE NE TE TROUVE PAS ?


 

Juste en cette minute

quand nous nous échappons

au meilleur des mondes possibles


 

Gil de Biedma


 


 

Cherche-moi dans le salpêtre des mers du sud,

dans la ligne qui sépare la terre du ciel,

dans les livres usés de Paris

ou dans le couchant rose de Pest.

Cherche-moi dans l’abstraction du temps,

quand je rôde dans ces maisons d’or,

dans les ombres de l’amandier en fleur.

Cherche-moi dans les mains dévastées de ma grand-mère,

dans les hauts-de-forme,

dans les tombes d’un cimetière tunisien.

Cherche-moi dans les traces des chiens

et dans le régal nocturne du Maroc.

Ne me cherche pas ici.

Je n’y suis pas.


 

***
 


 

CASILLERO DEL DIABLO

Y luego, en otoño, el aire seco y vibrante,

cargado de áspera electricidad estática,

que inflama el cuerpo bajo la ropa liviana.


 

Durrell


 

La vida puede ser hermosa

con esos pequeños gestos mundanos,

o cuando escuchas un disco de los Dire Straits,

o con un paseo otoñal en esa mar nuestra

que nos vio nacer y nos nace siempre.

Con una boca carente de pudor y de soberbia

cuando muerdes la manzana podrida

del deseo,

y caes torbellino abajo

al fondo más oscuro de la mente,

donde hay unas bragas

y esperma y sangre y tú luces como nunca.

O con las viejas fotografías de mi abuela,

dichosa sobre su moto azul,

donde siempre me parece estar ahí,

retratándola.

Cuando esos crepúsculos

que no son ya rojos, sino dorados y eternos,

clavados para siempre en tu retina,

a fuego en Istanbul, en Buda tatuados.

Con el blanco y negro de algunos filmes,

el grito de ¡Marcello! en la Fontana

las risas de esas chicas que se abren al mundo.

La copa de vino que empapa tus venas,

el verso que arrastra y que araña,

que embruja –oh, sí, esas lecturas

de noches adolescentes-.

Con una conversación, quizá;

una cena en Roma bajo aquellas farolas

amarillas, como las de Pérgamo,

y ese cubata agrio que nos hizo reír en Atenas.

Pero luego,

¿qué hay detrás de todo aquello?

¿comprenderemos algo al final del trecho?

Somos objetos vacíos

que alguien guarda.


 


 


 

CASIER DU DIABLE

Et ensuite, en automne, l’air sec et vibrant,

chargé d’âpre électricité statique,

qui enflamme le corps sous la robe légère.


 

Durrel


 


 

La vie peut être belle

avec ces petits gestes mondains,

ou quand tu écoutes un disque de Dire Straits,

o avec une balade automnale dans cette mer à nous

qui nous vit et nous fait toujours naitre. 

Avec une bouche dépourvue de pudeur et d’orgueil

quand tu mords la pomme pourrie

du désir,

et tu tombes en aval des tourbillons 

au fond le plus sombre de l’esprit,

où il y a une culotte

et du sperme et du sang et tu brilles comme jamais.

Ou avec les vieilles photographies de ma grand-mère,

heureuse sur sa moto bleue,

où j’ai toujours l’impression d’être,

en lui faisant le portrait.

Quand ces crépuscules

qui ne sont plus rouges, mais dorés et éternels,

cloués pour toujours dans ta rétine,

au fer rouge à Istanbul, tatoués à Buda.

Avec le noir et blanc de certains films,

le cri de Marcello ! dans la Fontana

les rires de ces filles qui s’ouvrent au monde.

Le verre de vin qui trempe tes veines,

le vers qui entraîne et qui griffe,

qui ensorcèle –oh oui, ces lectures

de nuits adolescentes-.

Avec une conversation, peut être ;

un dîner à Rome sous ces lampadaires

jaunes, comme celles de Pergame,

et ce cocktail aigre qui nous fit rire à Athènes.

Mais ensuite,

qu’y a-t-il derrière tout cela ?

comprendrons-nous quelque chose au bout du chemin ?

Nous sommes des objets vides

que quelqu’un garde.


 


 

***


 

AUREA MEDIOCRITAS

Evocando el pasado y los días lejanos

lloraré.


 

Verlaine


 


 

Mi estado es cambiante

-por qué negarlo-,

mudado en aquella o esta circunstancia,

ocasión o lugar donde me halle.

Mi estado es adverso ante una falda,

ante un cigarro mal apagado

o esa laca barata que usas los lunes.

Es catatónico si pierdo en la batalla,

nublado algunas tardes soleadas,

brillante con alcohol y noches,

fálico si la prisa apremia,

si la ley impera descarado.

Voy de lo flexible a lo volcánico,

salvaje cuando hay gente,

pacífica si me entreno.

Evitando el punto intermedio,

alejándome siempre de lo mediocre.


 


 

AUREA MEDIOCRITAS

Je me souviens des jours anciens

et je pleure.


 

Verlaine


 


 

Mon état est changeant

-pourquoi le nier-,

mué en une quelconque circonstance,

occasion ou lieu où je me trouve.

Mon état est rétif devant une jupe, 

face à un cigare mal éteint

ou devant cette laque bon marché que tu utilises le lundi.

Il est catatonique si je perds dans la bataille,

nuageux certains après-midi ensoleillés,

brillant avec l’alcool et les nuits,

phallique si l’envie me presse,

si la loi règne, effronté.

Je vais du flexible au volcanique,

sauvage quand il y a du monde,

pacifique si je m’entraîne.

En évitant le juste milieu,

en m’éloignant toujours du médiocre.


 


 

Extraits de “Verbos por dentelladas” (RavensWood Books, 2016)


 

Traduits de l’espagnol par Miguel Ángel Real


 

 

NOELIA ILLÁN CONESA


 

Noelia Illán Conesa

 

Présentation par le traducteur  :
 

Noelia Illán Conesa (Carthagène, Espagne, 1983), diplômée en philologie Classique, est co-directrice de la revue de poésie La Galla Ciencia. Auteure de Calamidad y Desperfectos (Las Cosas Triviales, 2012) et Verbos por dentelladas (RavensWood Books, 2016). Elle a participé à plusieurs festivals de poésie et collaboré dans différentes revues comme El Ciervo, El Coloquio de los Perros, Ágora o Meca. Elle figure dans plusieurs anthologies et a reçu différents prix de poésie et micro-récits.


 

Noelia Illán Conesa - DR

Noelia Illán Conesa - DR

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