ETERNO TEMPORAL
¿Puede seguir siendo un pretexto
el obstinado temporal que barre
tanto las hojas de los castaños
como los desheredados pensamientos
sobre la persistencia de la memoria?
¿O sería más acertado buscar la inspiración
en el abismo de gritos y ecos
en que se convierte mi amor y el planeta?
Puedo, supongo, seguir preguntándome
si no es más legítimo ahondar mis pesquisas
sobre el aire, el fuego o el secreto de las gaviotas
cuyo instinto planea en el laberinto de escorzos
de los más altos acantilados;
anhelar tu mirada que fue joven,
tu mejilla cuyo recuerdo
martiriza mi afán por renegarte;
perseverar en el inútil
desafío del cosmos,
en la consistencia exacta que tenía tu pelo
hace ya treinta años;
puedo probablemente cerrar los ojos
y pensar en ello
y entonces el objetivo está más cerca:
alcanzo casi
la piedra filosofal de tu presencia.
Sin embargo, las ráfagas de viento
que tanto anunciaba el periódico
me han vuelto prácticamente sordo
y solamente oigo
las arcadas de los viejos enfermos
o la septicemia invadiendo las entrañas de mi padre.
ETERNEL PASSAGER
Peut-elle continuer d'être un prétexte
la tempête obstinée qui balaye
les feuilles des châtaigniers
comme les pensées déshéritées
sur la persistance de la mémoire?
Ou serait-il plus aisé de chercher l'inspiration
dans l'abîme de cris et d'échos
que deviennent mon amour et la planète?
Je peux, je suppose, me demander toujours
s'il n'est pas plus légitime d'approfondir mes enquêtes
sur l'air, le feu ou le secret des mouettes
dont l'instinct plane dans le labyrinthe de raccourcis
des plus hautes falaises;
convoiter ton regard qui fut jeune
le souvenir de ta joue
qui martyrise mon effort pour te renier
persévérer en l'inutile
défi du cosmos,
dans la consistance exacte qu'avaient tes cheveux
il y a déjà trente ans;
je peux probablement fermer les yeux
et y penser
et le but est alors plus proche :
j'atteins presque
la pierre philosophale de ta présence.
Cependant, les rafales du vent
tant annoncées par le journal
m'ont rendu pratiquement sourd
et seulement j'entends
les nausées des vieux malades
ou la septicémie envahissant les entrailles de mon père.
Traduction de l'espagnol par Marceau Vasseur et Miguel Angel Real
MIGUEL ANGEL REAL
Il se présente :
Il poursuit des études de français à l’Université de Valladolid (Espagne), sa ville natale. Il travaille en 1992 à l’Agence France Presse à Paris. Agrégé d’espagnol, Inspecteur Pédagogique Régional dans l’Académie de Rennes en 2012, il enseigne au Lycée de Cornouaille à Quimper et intervient occasionnellement à l’Université de Bretagne Occidentale. Il se consacre aussi à la traduction de poèmes en collaboration avec Marceau Vasseur. Leurs traductions ont été publiées en 2008 par la revue Passage d’encres et en 2015 par le Festival de Cinéma de Douarnenez. En 2017 ils collaborent avec La Galla Ciencia (Espagne) et Le Capital des mots.
Il écrit également. En tant qu’auteur, certains de ses poèmes en français ont été publiés dans Le Capital des mots. Certains de ses poèmes en espagnol ont été publiés par les revues Letralia (Vénézuela), Fábula (Université de Logroño, Espagne), Marabunta ,El Humo et La Piraña (Mexique). Il a reçu le troisième prix du VII concours de Poésie "Atiniense" (Argentine) en 2016.
Note de l'auteur : "Temporal" en espagnol signifie tempête, mais également "temporaire". Merci à Marceau pour son excellente trouvaille, qui garde tout à fait le sens d'un poème dans lequel je me débats à la fois contre les éléments et contre le passage des années...