Effusion
Les autres
Toujours les autres
Ils sont légion
M’impressionnent...
Mais est-ce à moi
De faire l’effort
De m’avancer vers
Ou à eux
D’individuellement
Venir à ma rencontre...
Craindrais-je leurs réactions
Irrationnelles menaçantes
Leurs effusions d’individus
Ils sont légion
Toujours croissant...
Circonvenant mon horizon
M’étouffant sous la loi
Du plus grand nombre...
Mais est-ce à moi
Ou bien à eux
Ils sont légion
De déposer les armes
De me tendre la main...
Surtout
Ne pas se prendre les pieds
Dans le pathos
Dès la conclusion
De l’armistice…
***
Dis Platon
Altamira Lascaux monde cavernicole
Assujetti à d’obsolètes rituels
Ne préfigurait-il cette licence folle
Accablant aujourd’hui notre audiovisuel...
L’émoi l’effroi les sens y sont subordonnés
O Platon et nos parois mentales sont lisses
Comment dès lors vieux sacripant coordonner
Les diastoles et systoles de cœurs qui dévissent...
Qui de la femelle ou du mâle y prétendit
L’immodestie de l’un l’égotisme de l’autre
La nature ô Platon appartient à celui
A ceux qui l’imaginent ceux la faisant nôtre...
Ni tien ni mien ici-bas l’écran départage
Du divertissement du bruit des balivernes
Mêmement subjugués par ce fouillis d’images
Pouvions-nous ô Platon délaisser nos cavernes...
Un soleil au-dehors piégés dès l’ouverture
Nos pas précipités nos mains tendues vers l’astre
Tu ne nous as rien dit ô Platon des voussures
Qui s’effondrant sur nous conduiraient au désastre...
***
La Maison
La maison bouge sous le vent
Son toit tendu comme une voile
Presse son pas gonfle sa toile
Sur le chemin des hurlements...
La maison bouge sous le temps
Son toit vibrant comme un navire
Simule un peu ce bateau ivre
Et bat du pied tel un chaland...
La maison bouge sous le vent
A crève toit à crève voile
Et nos enfants du peu de toile
En font mille et un cerfs-volants...
***
Histoire d’eau
Ce grommelant nuage noir
Fallait-il le craindre
Ou la mutine goutte d’eau
Qui s’en détacha
Selon son choix
Opter pour le paratonnerre
Le parapluie au cas où...
Sur le toit la goutte rebondit
Digne chatte des gouttières
Par la chanlatte se faufila
Avant d’à son aise
Elle a son temps jusqu’au ruisseau
En large flaque se répandre
Tout en craignant le caniveau...
Le chenapan y barbote
Y fait voguer ses p’tits bateaux
Un piéton malgré ses bottes
Malencontreusement chut dans l’eau
Se rattrapa-t-il à la branche
A sa traction elle céda
Moisie... patatras...
La goutte poursuivit son périple
Elle n’avait ni le temps ni la tête
A consacrer au défunt
Lui fallait
Dare-dare gagner l’océan
D’où l’implacable météo
A nouveau la condenserait
En particules d’eau...
Morale :
Ne jamais laisser la goutte déborder
Et de l’urne noyer les cendres...
***
Vengeance
Les mots pour le dire puis les maux pour médire
Aurions-nous survécus qu’à titre de vengeance
Depuis l’aube des temps condamnée notre engeance
A s’ébattre d’abord puis sûrement s’occire...
Pourtant les monts les vaux ont retenti de rires
Provoqués notamment par nos communs faux-pas
L’expérience des uns n’engageant en ce cas
Pour les plus clairvoyants qu’une notion du pire...
Plus douce que le miel a dit le vieil Homère
Pour les siècles à venir nous garantissant
D’un mal déjà acquis dont le retentissant
Sont propos avisés de compères et commères...
A longueurs de journées leur haine fourbissant
Sur l’autel sacrifiant leurs amitiés si chères
A ces dieux justiciers qui au titre de pères
Leur intiment de vivre en s’anéantissant...
***
Dira-t-on le suicidé
Peu pressé malgré leur malsaine envie
D’abandonner triste miséricorde
L’assemblée délibérant de son destin
Sans y devoir dresser un panthéon
Il songea à son éventuelle absence...
Ne leur offrit aucune occurrence
Les laissa moisir dans l’indéfini
Parier sur l’eau le gaz la corde
Les plus futés sur le féminin
Les plus blasés sur l’entropie...
A leur insu leur amena la discorde
Sachant que toute amitié s’y délie
Au gré de ses procrastinations
Vit leur estime s’effilocher enfin
Débarrassé de leurs prévenances...
Laissa seul un A.V.C. l’emporter...
***
Bouteille à la...
Amis buvons un verre il en fallut plus d’un
Issus des meilleurs crus et des meilleurs cépages
Avant de l’euphorie atteindre au radotage
Dans la rue tituber éructer c’est commun...
Ces flacons alignés correspondant aux heures
Plombées passées à s’interroger seul à seul
Sur le cru et le cuit la blancheur du linceul
L’inanité des sens et de l’amour son leurre...
Boire ou choisir pour de ces maux lequel s’éprendre
Débuter au bordeaux finir à l’ermitage
Au plus noir s’étancher de ces divins breuvages
Puis enfin saoul inviter Dieu à condescendre...
Téméraire sans soif à nouveau remplir l’outre
Dégonflée d’avoir exprimé tout son venin
Sur la page ou biffée se corrige un quatrain
Signaler d’un espoir celui de passer outre...
Notavinophile hélas tes pichets sont vides
L’ivresse a ses raisons que n’a pas l’étiquette
Jamais déshonorant ces vulgaires piquettes
Dont l’insidieux poison demeure seul subside...
Bouteille à la mer un matelot a crié
L’ancre a été jetée sont ramenées les voiles
A terre un poète encalminé se dévoile
D’un revers de sa main bouscule l’encrier
***
Fils
Sans savoir ni pour ni quand
Ni par où ni comment...
Quels jeux seront les vôtres
Quand au petit matin
Tairont les patenôtres...
Survivre au temps clos
A l’amour qui se meurt
Au doute qui tenaille...
Quels seront vos apôtres
Pierre Paul Vespasien
Ces dieux qui furent nôtres...
Survivre à l’espoir
A l’amour qui ne vient
Au doute qui cisaille...
Quelles sont ces cohortes
Tyrans vos noirs desseins
Trop tard... ma porte...
Sans savoir ni pour ni quand
Ni par où ni comment...
Survivre au froid
A vos témérités
A l’amour...
Assassins...
***
Méandres…
S’étaler en méandres ou creuser son sillon
Jamais aucun cours d’eau ne dévia sa course
Gonflé dans son élan par de multiples sources
Y mêlant leurs transports et leurs inspirations…
Ainsi en va-t-il concernant nos destinées
Périlleuses ou hardies selon les aléas
Des barrages et canaux de notre mise au pas
Sinuant entre monts plaines ou défilés…
Avec l’obligation suivant sa propre pente
D’abandonner aux abords des grèves et rivages
Selon leurs basses eaux en ultime échouage
Ces véniels péchés dont il faut qu’on se repente…
Alors que gros d’espoirs bientôt jetés en mer
Bénéficiant d’un ultime mascaret
Sur l’arrière jetant un regard effaré
D’un parcours en zigzag nous constatons l’amer…