Le Capital des Mots.

Le Capital des Mots.

Revue littéraire animée par Eric Dubois. Dépôt légal BNF. ISSN 2268-3321. © Le Capital des Mots. 2007-2020. Illustration : Gilles Bizien. Tous droits réservés.


LE CAPITAL DES MOTS - GÉRARD LE GOFF

Publié par Le Capital des Mots sur 19 Janvier 2019, 18:08pm

Catégories : #poèmes

Intermède vénitien - Troisième mouvement : Galeries de l’Académie - II, Religioso

 

La peinture catholique italienne de la Renaissance a peuplé d’anges les « ciels » de ses tableaux: des bambins replets folâtrant nus dans la nue, parfois de simples figures joufflues, affublées d’un collier d’ailerons de poulets.

Le royaume de l’éther ne pouvait pas ne pas être habité. Qu’avait-on à proposer d’autre ? Les prêtres affirmaient qu’il convenait de mépriser les étoiles : ces simples trous dans la toile de la nuit qui laissaient passer la lumière du créateur. « Quelle profondeur pour le firmament ? » ironisaient-ils. « La mer assumait la sienne, cela suffisait. » Ils interpellaient les rares contradicteurs, les brûlaient parfois : « Vous avez dit : planètes ? Vous avez dit : astres ? Le Soleil est un païen. Méritoire, certes, pour les moissons, mais un païen tout de même ! » Il fallait pourfendre les cultes archaïques. Il fallait moquer ces prétendues révolutions de notre Terre soumise à l’attraction d’une fournaise blasphématoire. « La Lune se révèle ténébreuse et froide. Alors, abandonnons-la aux hérétiques et aux sorcières ! » Ils ne savaient rien des marées. Le Paradis devait rester à la hauteur des nuages. Cela n’avait rien d’incroyable. Ceux-ci ne s’effilochaient-ils pas souvent au fil des campaniles ? Pourtant, les seules créatures ailées visibles à Venise restaient les pigeons, lesquels chiaient sur sa splendeur.

 

Extrait de : Intermède vénitien, notes sans portées décomposant un prélude et sept mouvements. Vient de paraître dans la collection Lieu aux éditions : Encres Vives- Michel Cosem, ISSN 1281-4741, ISBN 2-8550 © 2019.

 

*

 

Le cours de l’été

 

Le ciel, soudain si proche, compose une pure voûte bleue.

A l’amont du grand large jusqu’aux confins des terres

S’érige un dôme de silence plus clair que l’éther,

Que rien ne trouble sinon ces nuages fabuleux

 

Que sont les grands oiseaux blancs, figés sur leur erre,

En croix, leurs ailes glissées sous le vent invisible.

Les lents courants côtiers creusent l’écart intangible

Entre le sable et le sel, le flot et l’estuaire.

 

La marée remonte le fleuve et va s’amarrer

A ce port de songe, sous les murailles armoriées

D’une citadelle sans âge aux jardins suspendus.

 

Là, les mêmes oiseaux venus de la mer tissent l’air,

Cousent les frondaisons des rives, festonnent l’eau stellaire,

Toujours sans un bruit - comme si le monde s’était tu.

 

Extrait de : Arsenal des eaux, inédit.

 

*

 

Octobre

 

Le soleil poudre à frimas nos fenêtres d’automne.

Des grains de grêle criblent la ronde affolée des feuilles.

Tous ces nuages passés au fil de l’horizon,

Au gré du vent, ignorèrent la source de la mer.

 

Entre chien et loup tant l’étincelle désire l’étoile

Qu’elle embrase l’âtre à la suie plus noire que la nuit.

A ce feu vif, pourrons-nous brûler nos regrets,

Réchauffer nos vieux os et nos tièdes espérances ?

 

Octobre nous vêt de laine, de brume et de détresse.

Nous entendions tantôt chanter les écoliers :

Eux, dansent dans les flaques, les tourbillons de fleurs mortes,

Infatigables vagabonds de l’imaginaire.

 

Extrait de : Juste à côté du silence, inédit.

 

 

 

 

Il se présente :

 

Né en 1953, Gérard Le Goff a été successivement enseignant en lettres, cadre administratif de l’Education nationale et conseiller en formation continue. A entrepris depuis son départ en retraite de se plonger dans ses archives, encombrées de manuscrits (sédiments d’avant la révolution informatique), de tapuscrits, de synopsis et de diverses autres élucubrations - plus ou moins inachevés. Un salutaire travail d’élagage (comme on le pratique avec un vieil arbre toujours vigoureux) lui a permis de proposer des textes à peu près cohérents à qui voulait bien s’en emparer.

 

     S’en est également suivie une reprise salutaire de l’activité d’écriture : romans, nouvelles et toujours de la poésie. Travaille en parallèle la peinture et le dessin, accompagné par une artiste professionnelle, qui parvient à le supporter.

 

     A publié quelques poèmes dans les revues Haies Vives (septembre 2017), Festival Permanent des Mots (Mars 2018 et septembre 2018) et Le Capital des Mots (novembre 2018). Une de ses nouvelles (Le jardin dérobé) a été sélectionnée pour paraître dans le numéro 90 de la revue Traversées. La maison d’édition Traversées lui a également proposé la publication en 2019 d’un recueil de poèmes intitulé : L’orée du monde.

 

     Vient de signer aux éditions Encres Vives-Michel Cosem pour l’édition de trois plaquettes de poèmes : Cahier de songes (septembre 2018), De l’inachèvement des jours (octobre 2018) et L’arrière-pays n’existe pas(décembre 2018).

 

Son site :

 

https://gerardle-goff4.wixsite.com/monsite

 

Gérard Le Goff . Portrait ( Avignon) - DR

Gérard Le Goff . Portrait ( Avignon) - DR

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