L’an neuf
A quoi bon une nouvelle année ? Pour lui, la vie s’achève.
Le vieil homme regarde les visages fardés qui roulent comme des galets dans l’eau vive de la fête. Les masques chahutés dans le torrent des rires et des chants. Les silhouettes dansantes d’autres qu’il ne sait nommer.
Echoué sur une rive de moleskine, il balbutie. Labiales rouges. Des bulles éclosent dans sa bave.
Vers quel horizon s’en est-elle allée ? Son regard s’efface peu à peu dans le bleu du ciel. Il le croyait inaltérable telle une gemme sertie dans la nuit.
Alors quoi dire ? Depuis ce jour d’été, quand le miroir ne s’embua plus. L’odeur fade d’un bouquet de fleurs fanées flottait dans la chambre.
Bien sûr il lui reste un refuge. Mais son corps décharné peine à s’inscrire sur le lit ouvert, comme si de l’amour il ne pouvait rien écrire de plus. Sa pâleur tremble dans le reflet des vitres.
L’absente ne signe aucun regret. Il la devine errer dans quelque univers inexploré.
La simplicité du désir n’aide plus. Trop de rêves le dispersent. Tant de mémoire le troue.
Hors les murs, l’eau mouvante reflète la courbe du monde.
L’ombre impose ses mains bleues sur son front.
Extrait du recueil : Passants, vient de paraître aux éditions Encres Vives, collection Encres Blanches, N°756 © Encres Vives, dépôt légal avril 2019, ISSN 1625-8630 / ISBN 2-8550.
Pour se le procurer : https://encresvives.wixsite.com/michelcosem/edition
*********
Qui toque à la porte
Mal venu fol vagabond
Vent mauvais d’hiver
*
Le ressac disloque
Les chapelets noirs des algues
Aux mains des noyés
*
Chaque souffle dans le vent
N’écrit rien ne dessine pas -
Trace d’ombre sans mémoire
Trois haïkus extraits du recueil : Le reste du peu (à paraître)
*********
Rosée subtile envoyée
Silencieuse espérance
Que nul ne voit venir
Bulles de verre filé
Semées au gré
De l’écheveau de l’araignée
Portées de notes cristallines
Au hasard des halliers
Qu’ignorent les oiseaux
Sur le cœur des roses
Le prisme de la clarté
Estompe son orient
A chaque aurore
L’univers se venge
Du désaveu des anges
Extrait du recueil (en cours d’écriture) : Arsenal des eaux, inédit
GÉRARD LE GOFF
Il se présente :
Gérard Le Goff travaille la prose (roman, nouvelles), la poésie, le dessin et la peinture.
Cinq de ses recueils de poésie ont été publiés par les éditions Encres Vives.
Plusieurs de ces textes poétiques sont parus dans les revues Haies Vives, Festival Permanent des Mots et Le Capital des Mot.
Une de ses nouvelles: Le jardin dérobé vient de paraître dans le N°90 (mars 2019) de la revue Traversées.
A paraître prochainement : un recueil de haïkus : Le reste du peu, un recueil de poèmes : L’orée du monde et un roman : Argam.
Son site : Gérard Le Goff : Amers & compas, https://gerardle-goff4.wixsite.com/monsite