MES JARDINS…
Mes jardins, je les ai suivis du bout de mon pinceau,
accrochant chaque tache de lumière à la soie pigmentée.
Balayant souplement mes idées incongrues perdues vers
d'autres cieux et pourtant réunies.
Un pinceau, dérisoire face à l'éternité.
Des jardins de rajah aux jardins parisiens,
des jardins de l'enfance à mon jardin aimé, réalité louée, fait d'arbres
centenaires et de houleuses prairies, sous le vent,
de criaillements d'oiseaux comme des enfants rageurs,
des jardins prodigieux aux mystères enchantés,
où le Pan facétieux vous sourit l'air badin,
enivré de sucs héliotropes.
Mes jardins, je vous aime.
L'ombre tant recherchée sous la chaleur aiguë apaise
ma moiteur, mes idées malvenues à propos des mille-pattes,
ou autre araignées qui viendraient s'infiltrer dans mes cheveux brouillés.
J'en ai souvent eu peur, ignorant leurs coutumes,
de leurs invites arachnides.
Mes jardins, faufilés dans l'ombre de mes affres, mes jardins
de chimères, idéal éphémère,
ne se réaliseront qu'au plus profond des astres.
Que n'y suis-je déjà…
***
CETTE HOULE
Sur la lande éblouie de lumière,
des vagues d’herbe roulent sous les vents d’aval,
aboient des chiens perdus.
Juste une entaille de soleil entre les branches
irrigue mon œil ébahi de tant de grâce ardente
Les chants d’oiseaux éclairent mes oreilles
Mes cheveux empoignent le vent qui passe
Une effluve d’algues passe par mes narines,
Le goût du sel sur ma langue, c’est la mer non loin.
Comme une douce mélodie, cela revient.
L’infini ressac de la mer, plus bas sous la falaise.
Murmure d'écume chuinte entre les galets, quand elle s'étale,
immense, épuisée, rompue par les rochers aigus.
Rochers qui saillent sous l'assaut des tempêtes millénaires.
Rochers qui savent et respirent, se forment sous la houle.
Tout est doué de sens et de formes.
Vagues qui tanguent donnant au sable
des rondeurs et des creux dans la mémoire des plages.
Vagues si tendres au matin très tôt, qui peuvent si bien échouer
les bateaux dans leurs magnifiques colères.
Houle de mon cœur, flûte enchantée des conques nacrées,
Petite cavité d'humus,
Terre d’élixir, mer de vibrance.
J’irai m’y fondre éclairée d’euphorie.
***
L’HIVER DE LA VIE
On a de vilains mots pour dire le vieillesse,
Baderne de croûton, croulant de toute espèce,
Perte d’autonomie, retombé en enfance…
Ténacité sénile d’un pépère troisième âge…
Ô enfance si chère qu’elle est toujours en liesse.
A tout ces mots grinçants, apport d’un héritage,
A la géronte caduque et dégénérescente,
J’affectionne plutôt la vioquerie transcendante.
A petits mots précieux, pour ne pas encombrer,
On dira cher ancêtre, patriarche, vieux routier.
J’honore la vieillesse, ou du moins l’appréhende,
Car je suis à sa porte en princesse froissée
Par des heurts si soudain et des bonheurs intenses
Que nul ne saurait me faire escamoter
Sillons de rides de mon allègre vie
Où s’écoule une eau pure sur une terre de peau
Encore vermeille et lisse
Baignée par tant de feux,
Changeants en l’occurrence.
Nous ne sommes pas vieux,
Nous sommes juste omniscients
Equipés d’un savoir que le bel âge ignore
Et pourtant la verdeur possède en elle l’acquis
Déjà rencontrée sans ses anciennes vies.
Réjouissons-nous, nous sommes de passage
Nos printemps reviendront, ainsi que nos outrages,
Notre nubilité fera le lit de l’âge.
Seulement il est une chose que nous devons comprendre
Et ne nous trompons pas, car cela est étrange,
Tant que nous n’aurons pas saisi nos archétypes
Nous reviendrons encore remettre le couvert
Et danser sous la lune… et penser à l’envers.
CLO HAMELIN
Elle se présente :
Initiée au dessin et à la peinture par un grand-père appliqué et ingénieux, Clo Hamelin dessine depuis l'âge de 10 ans. On lui offre à 12 ans un vieil appareil photo Rolleiflex qui lui permet de photographier ce qu’elle peindra par la suite.
Après des études d'art dramatique au Conservatoire national de Paris, elle s'intéresse au milieu carcéral psychiatrique, et part étudier comme infirmière à l'hôpital Sainte-Anne de Paris, où elle est sensibilisée à l'art brut.
Devenue maman, elle sera typographe, puis journaliste, et étudiera l'art de la photographie.
Le travail d'Art décoratif, qu’elle étudiera chez les Compagnons de France, puis celui de peintre lié à celui de la photographie qu'elle manie avec autant de poésie, décèlent un parcours éclectique, et signifient l'aboutissement d'une démarche artistique amorcée il y a longtemps, en marge des modes, jalonnée d'acquis, de couleurs, de motifs glanés au fil du temps, des lectures et des routes.