SOUS-BOIS
(VESPERALE)
Marcher dans le sous-bois, au long de la rivière.
Regarder s’écouler l’eau, comme une prière
Qui a jailli du sol, au loin . Etre attentive
A tous ces petits bruits venant de l’autre rive.
Oublier le fracas et les fureurs du monde
Qui, plus loin, là, partout, semblent lâcher la bonde.
Remplacer le chaos par la sérénité.
En marchant, se laisser aller à méditer.
A une vieille pierre, s’arrêter et s’asseoir.
Ecouter des oiseaux la prière du soir.
Puis, quand l’ombre est venue, rentrer en sa maison
Et s’y retrouver bien, tout au long des saisons.
….
LA DAME DE L’AUTOMNE
L’été était parti vers d’autres paysages,
Les nuages tissaient leur camaïeu de gris
Dans le ciel encore gai, et les feuilles des arbres
Avaient viré à l’or et au roux, puis au brun,
Etendant leur splendeur sur l’herbe du sous-bois.
Les derniers papillons voletaient dans l’air doux,
On savait qu’ils étaient à la fin de leur vie.
Pensive, elle marchait dans les allées désertes
Et sa robe froissait le lit des feuilles mortes,
Dans un bruit qui semblait le murmure que font
Les lèvres qui vous glissent à l’oreille un secret.
Je songeais au tableau de quelque maître ancien,
Et aux tapisseries de l’école flamande.
Qui était cette femme ? Dérobée tout à coup
Au tournant de l’allée, par un chemin secret
Qui menait vers un lac, elle avait disparu
Comme une apparition qu’un vent léger emporte.
J’ai hanté ce sous-bois mais ne l’ai plus revue.
Sur l’eau du lac parfois flottent des feuilles mortes
Semblables à celles qu’en marchant son pied froissait
Et que sa longue robe emportait à l’ourlet.
Bien du temps a passé, le mystère demeure,
Et dans mon souvenir elle reste à jamais
Comme un rêve éveillé, un rendez-vous secret,
« La Dame de l’Automne ».
Octobre 2003
….
L’ERRANT
Le Vent était à ma fenêtre,
Il disait « je suis un pauvre être
Las de courir les horizons
Et je rêve d’une maison
Où reposer mon corps perclus
Mais ne l’espère déjà plus
Car je suis tout trempé de pluie
Et nul ne veut m’ouvrir son huis. »
Le chat miaulait au même instant,
Dehors, dans la pluie et le vent ;
Alors, j’ai entr’ouvert ma porte
Très peu, je voulais faire en sorte
Que le chat se puisse abriter,
Mais sans que je l’aie invité
Le vent s’est glissé sans un bruit
Avant que je referme l’huis.
Pour que j’oublie son intrusion
Il a fredonné des chansons,
Dit des histoires fantastiques,
Murmuré des contes antiques
Recueillis en pays lointains
Sur les routes et les chemins.
Puis il m’a dit : « Prends un crayon
Et lorsque nous discuterons
Politique ou philosophie,
Que nous parlerons de la vie,
Du passé ou de l’avenir,
Quand je dirai mes souvenirs
Tu pourras noter quelquefois ;
Ainsi je paie ce que je dois. »
Et le Vent m’a dit tant de choses
Parfois noires et parfois roses,
Que je l’ai gardé prés de moi
Et j’ai noté pendant des mois.
Un jour le soleil du printemps
A réchauffé bêtes et gens
Et le Vent a dit « Je m’en vais
Ouvre la porte s’il te plaît. »
Pendant l’hiver j’avais écrit
Tout ce que le Vent avait dit.
Il était philosophe et sage
Et j’ai consigné dans ces pages
Des pensées et des réflexions,
Des proverbes et des dictons
Venus de loin ou d’à –côté.
Il faut une moralité
A cette bien étrange histoire,
Je vous demande de me croire
Cet Etranger pauvre, ce Vent,
M’a laissée plus riche qu’avant
De cette monnaie impalpable
Que ne connaît pas le comptable
Et dont nous avons tant besoin :
La connaissance du Prochain.
….
LE GRAND VOYAGE
Je cherche dans le vent, je cherche dans les flots
La trace de ses cendres ; et la terre elle-même
Dit qu’elle ne sait pas où l’on a déposé
Ce qu’il reste de lui.
Un nuage peut-être garde le souvenir
D’une fumée légère s’élevant lentement
Quand les flammes l’ont pris.
Une femme légère qui s’est unie à lui
Et qu’il a emmenée faire le tour du monde.
Octobre 2006
GINÈVRA
© Ginèvra Fautras
Ginèvra est née en 1926 à Pistoia ( région de Florence , Italie). Participe au Club-poésie de Champigny sur Marne, au Café Poésie de Fontenay sous Bois et à l'Echelle à Coulisse ( Paris) . Ses poèmes figurent sur un cd fait par des professionnels (1 heure 15 minutes de poésie – Voix de l'auteur). Contact : 01 48 77 06 11.
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