Éloge de la pierre
Le bois travaille,
Le cristal chante.
La pierre, non.
Parfois,
Quand c’en est trop,
Elle se casse.
***
Magie mineure
Ce rayon
De soleil a
Parcouru cent-
Cinquante millions
De kilomètres et toi tu
N’as même pas ouvert
Tes volets
*
Couché sur le papier
Le monde
Continuait de grogner
*
Depuis quand y a-t-il
Un arbre en fleurs
Dans ce jardin ?
*
Un enfant ramasse
Un bout de bois
La forêt se cache
Derrière son petit doigt
***
Vie de poète
Pour Marc G.
écrire
au facteur, offrir
des fleurs
à la fleuriste
composer des vers
sur la Mort
(impérissables,
tant qu’à faire)
conter fleurette
à la crémière
l’inviter à sa prochaine
pendaison
***
Tout jouer
Tout jouer
Harpe entière
Tout boire
Jusqu’à l’amer
Ramper
Comme la panthère
S’assombrir
Jusqu’aux éclairs
Ne pas tuer
Le père
Passer
Au travers
***
Blanc, dit la neige
- Blanc, dit la neige.
- Noir, dit la terre. Noir, brun, gris, vert, ou même beige. Mais blanc : ça non, pas question !
Au sol, c’est l’hécatombe. Par milliers, par millions, les flocons tombent, et fondent. On dirait des étoiles qui s’éteignent en touchant la terre détrempée.
- Blanc, dit la neige.
- Noir, dit la terre. Anthracite, ocre, sienne, marronnasse. Mais pour le blanc : non, pas de place.
Et c’est vrai, quand on regarde cette gadoue peu ragoûtante… On ne voit pas comment les flocons à venir réussiraient mieux que les premiers. Franchement, il y aurait de quoi se décourager.
D’ailleurs, cela s’est déjà vu. Des après-midi où la neige tombe pendant cinq, dix minutes – et puis rien. Comme si elle n’avait jamais existé. C’est d’une tristesse ! La neige, il faut qu’elle tienne, pour exister pleinement. Tant qu’elle volette dans le ciel, ce n’est pas encore tout à fait la neige. Tout au plus un projet de neige, une idée qui se cherche. Il faut un cœur d’enfant pour comprendre cela – un cœur d’enfant qui exulte au fond de la classe, qui vibre avec le grand ciel d’hiver en jetant des coups d’œil furtifs par la fenêtre, et qui n’écoute plus rien de ce que dit le maître.
Cette fois-ci la neige insiste. Inaccessible au doute. Maintenant de gros flocons mouillés s’accrochent aux brins d’herbe. Par milliers, par millions, la neige continue de neiger. Des îlots de blancheur apparaissent ça et là, s’étendent insensiblement, se rejoignent.
- Blanc, dit encore une fois, tout doucement, la neige.
La terre se tait. Elle écoute, on dirait.
MARCOVALDO
Il se présente :
Marcovaldo
Ingénieur agronome, psychothérapeute, poète, Marcovaldo, originaire de la région parisienne, vit en Limousin depuis une quinzaine d’années.
S’il écrit des poèmes depuis l’adolescence, c’est seulement vers la quarantaine qu’il se soucie de les publier. Convaincu que les recueils et revues classiques ne sont plus les seuls véhicules de la poésie dans le monde d’aujourd’hui, il expérimente depuis quelques années diverses manières de partager son goût des mots, des rythmes et des images poétiques : textes de chanson, sessions de slam, blog, poème-clip…
Poèmes publiés dans des revues : Les Tas de Mots, Flammes Vives, Les Amis de Thalie
Clip : « Tant pis pour la mousse », poème slamé accompagné d’illustrations et d’animations de l’auteur
Textes de chansons : Collaboration à l’album d’Armand Frydman, « D’amour, d’embruns et d’étoiles »
Chronique : « Comme un besoin urgent de poésie », publié dans la revue littéraire et picturale Les Amis de Thalie ; Marcovaldo y partage sa passion pour la poésie, de tous styles et de toutes époques.
Blog « Poésie, langue vivante » : https://marcovaldo-poesie.blogspot.fr/