Le Capital des Mots.

Le Capital des Mots.

Revue littéraire animée par Eric Dubois. Dépôt légal BNF. ISSN 2268-3321. © Le Capital des Mots. 2007-2020. Illustration : Gilles Bizien. Tous droits réservés.


LE CAPITAL DES MOTS n°13 - Janvier 2009- Dominique Sorrente-

Publié par LE CAPITAL DES MOTS ( revue de poésie) sur 1 Décembre 2008, 00:03am

Catégories : #poèmes

 

 

 

 

 

                              EMPIRE DU MILIEU INTÉRIEUR 

 

 

 

 

Je passe d’un morceau à l’autre de moi-même et je m’adresse de loin cette parole : « Comment vas-tu là-bas yau d’pipe ? ». Et l’autre, yau d’pipe, dans sa cahute qui ronfle à cet instant-là me dédouane vertement. Pas de réponse. Un nouveau compère surgit alors d’un îlot inconnu : « Salut à vous, les incomparables ! ».

Il porte agrippée au dos une autre époque assurément. Il ressemble comme une goutte d’eau et ses sœurs orphelines à un bouquet de rêveurs qui traverse la scène. Faillissant de donner leurs oracles, prenant geste pour cause, puis se ravisant. Une pierre en ricochet, et hop, dans la trouée du concentrique, disparus ! Dans les civilisations policées, on nomme possiblement cela un « peuple ». Faute de preuves, un tant soit peu tangibles, je préfère les appeler « mes habitants ».

 

Sachant que le décompte n’est pas à l’ordre de la nuit, qu’il y en a toujours un qui manque à l’appel, que l’appel lui-même claudique, parfois passant la surmultipliée, parfois manquant à lui-même.

 

Je me dis quand je m’écoute, les jours d’humeur vive, que, si par bonheur un arbre venait à planter de toutes ses racines au milieu d’eux, je serais sauvé. Mes habitants, avec.

 

Sauvés comme la forme d’une bulle. Ou bien la vache qui se déhanche dans l’enfance. Ensemble, on s’inventerait un pays d’herbes de lenteur.

 

Sauvés. Sur cette rive, tout du moins.

 

 

 

           

**

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                    OISEAU PASSEUR

 

 

 

 

 

 

                                     PREMIÈRE SÉRIE

 

 

 

 

Mettre l’entaille au cristal arrogant du concept.

 

                                                *

 

Définir, c’est d’abord finir avec un dé.

 

                                                *

 

Dans la tourmente, garde toujours près de toi une queue de sirène.

 

                                               *

 

Parti en quête d’un travail de fourmi. Tu verras comme le monde est minutieux.

 

                                               *

 

 

Prendre ses distances d’avec l’inexistant, en jouant soigneusement aux billes.

 

 

                                               *

 

Parole du très- bas de passage: chaque jour est un acte manqué qui s’ignore.

 

 

                                               *

 

À mi-chemin, ne demande plus rien à la lumière ; elle captiverait ton pas.

 

                                              

 

 

L’appui du rêve : lentement comme pour nous rejoindre, il amasse ses chants autour de nous. Puis il devient le cri qui heurte.

 

                                                        

 

                                               *

 

Mettre en recul le petit moi jacasseur par le seul fait de jouer aux dés l’instant qui vient, avant même d’inventer les règles.

 

 

 

                                               *

 

 

Cette ligne en discontinu que je poursuis, tantôt cassé, tantôt liant.

 

Qui, de nouveau ?

 

                                       

 

**

 

                                     DEUXIÈME SÉRIE

 

 

 

C’est de nuit que tisse l’inconnue ;

les passages se laissent prendre au réveil.

 

 

                                     *

 

 

Sagesse de ces nations-là :

l’aube affranchit l’oiseau,

le soleil, deuxième arrivant,

le rend siffleur.

 

 

                                     *

 

Qui n’est ni de roseau ni d’infini,

mais glisse à leurs côtés

et sans prendre parti,

la bouche rendue autre.

 

Souffle nomade.

 

 

 

 

 

 

Liesse qui tousse,

monstre qui fume :

aucune affaire pliée d’avance.

 

 

                            *

 

Sur ses cinq lettres à l’esprit caché,

on dit que le repos,

lui-même un jour,

trouva repos.

 

                                     *

 

 

Celui qui parle et ne sait rien.

Celui qui sait et ne dit rien.

Chacun son tour vous invente le monde,

clignant de l’œil.

 

Et le rien n’en pense pas moins.

 

                                     *

 

On ne demande pas à un arbre, fût- il bien élevé,

de compter ses branches.

 

                                     *

 

N’arrête pas les étoffes du feu. Fais-en des chamanes

pour lâcher ta parole dans l’osier du jour.

 

                            *

 

Marée noire, tempêtes à volonté,

l’année a fini fort pour nous envoyer ses signaux.

 

Auront-ils entendu, cette fois, les contrôleurs du temps,

les obligeurs de logique,

assis devant l’ordinateur sacré,

voués au culte unique de son paradigme binaire,

auront-ils entendu

l’adresse infinie du vent ?

 

 

( Ces textes sont extraits d’Anthologie à quatre feuilles, Prix 2008 du Conseil Général des Bouches du Rhône, à paraître )

 

                                                                  DOMINIQUE SORRENTE

 

 

 

NOTE BIO DÉGRADABLE

 

Naissance : Milieu de nulle part, au milieu du dernier siècle

Décès : mention à compléter à convenance mais sans précipitation intempestive

Enfance figue et marron, olympienne et sablonneuse, bon élève en général mais renvoyé un jour de l’Ecole pour cause de poésie

Adolescence : tout à signaler

Âge adulte : à partir de 1978 ( parution de Citadelles et Mers-Sud), commence la poursuite à épisodes des poèmes de la maturité qui ne cesseront depuis d’être remis au lendemain.

Une étagère de carnets gribouillés, des publications en veux-tu en voilà, une vingtaine de livres: la quête est loin d’être épuisée tandis que le public semble l’être parfois. 

Récent fait d’armes désarmant : a obtenu cet été 2008 le Prix du Conseil général 13 pour le manuscrit Anthologie à quatre feuilles ( 1978-2008) qui doit donc impérativement paraître l’an prochain ou disparaître manu militari.

 

Pour une meilleure maîtrise du mode d’emploi, consulter sur internet wikipedia page Dominique Sorrente

 

Contact : dsorrente@club-internet.fr   ( beau défi du jour après jour pour que cette adresse de messagerie évite la saturation couleur rouge )

 

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