ESCLANDRES
Corps défigurant l'eauElle coule au-
dedans au-
dehors badigeonnent
les bassins
bleu-verts.
Un cri transperce
l'onde.
Elle se noie au milieu des figures.
*
Un geste
joue
Marelle étalonne
les orées de l'enfance
berce et entourloupe
l'anguille candide
Elle frôle d'une valse
Le coupable enchanté.
*
Brisure de dentelle
Tes hontes passagères
temporisent
un avenir de paille.
Patiente enfant
ta joie canaille.
*
Grêle
sur les traces silencieuses
Je chemine vers
la cime
écarlate
sous le poids
des vertus.
*
Éphèbe endort ma figure
J'éclabousse la lumière
D'un nu, je tends les peaux
et m'enveloppe au son d'une étoile.
*
Dehors, j'ai vu la flamme fendre les feux
elle crépite et étincelle
Tes cheveux un long brasier
enflamme mes paupières.
Dehors j'ai vu l'éclat de l'air
L'écoulement transparent des rais d'or
L'eau de la fontaine une pépite
Il neige sur les pierres en sommeil.
*
Les chants enlacent
les gouffres brandis
Un éclat d'étoile
illumine l'allée
S'érige la rougeoyante peine.
Consolée, elle regarde
un coquelicot éclos
et déverse son arôme
aux rayures citron.
*
Aux abords de la ville des visages s'emportent
L'appel des dieux s'engouffrent sous terre
Piétinés.
L'homme broyé geint sa soucoupe
défie l'or par le bronze.
Un pope élève son chant muet
Les marchés rient des babioles frelatées
exercent leurs impostures aux passants
Un mur s'effrite
L'hiver offre son ombre citadine
Ouvrez-vous grands, mes yeux,
rêvez pour ceux qui ne veulent plus.
Un gobelet d'or pour le macchabée.
*
Dans les moindres confins
les creux rejoignent
Le feu transfigure
Le dernier appel du marin aux tympans
englués de nos dérives
Aime-moi
Dérive ma muse vers
l'horizon
Je m'expatrierai sous le ciel laconique
et enfanterai de la chair à canon.
Notre monde vain
La mémoire fuit ses continents
Un territoire de fards
pour visée
Il défie le ciel étanche
Les murs pleuvent
La bouche pleine
Les verbes acculés.
*
Quand les arbres croulent sous le poids des fruits défendus
La larme qui brûle ma joue s'éprend de la terre
Elle tombe et la rejoint.
Il n'y a plus de verbe à penser ni de passion à souscrire.
Ressentir le monde et n'éprouver ni joie ni haine.
Dans mon dos les sentiers abattus s'écartent des raccourcis
J'ouvre mes bras
et regarde en croix le monde qui désormais m'enveloppe.
Je l'accueille
et lui baise la nuque.
Elle est fraîche et mes lèvres frémissent
sous ces baisers
J'accueille le Monde
Les yeux arrachés
Je m'étends sous le figuier
LAURENCE GAREL
Née en 1979, Laurence Garel réside à Paris. Après avoir suivi une formation à L'ERAC, elle joue au théâtre sous la direction de Thomas Ostermeier, Nadia Vonderheyden, Elisabeth Chailloux, Thomas Gonzalez.
Depuis 2007, elle écrit pour la compagnie européenne aqua.materia.
Vanishing-Waters, Femme-fontaine, et Le jour où Tirésias devint Tirésias ont ainsi été joué à Prague, Vienne et Marseille.
Elle travaille actuellement sur un recueil de poèmes Esclandres.