Why
1)
Why
bâillonné
il se traînait
le long des dalles
pieds douloureux
jours comptés
au cœur de la solitude
*
clameur de l’homme
il se dissimulait derrière
le judas
rêche
de pensers rudes
enfermé
*
empêtré
sombre silhouettes
arbres pleureurs
bleu de froid
embroussaillé
une station de croix
*
emberlificoté de paroles
langue perfide
cœur divagant
discorde
entre frères
brisé
sans recours
*
ferraillé
d’un irrémédiable gris
vide
derrière l’apparence
empli d’amertume, voilà pourquoi
2)
Why
joyeux
il effleurait
les dalles
pieds douloureux
jour après jour
moins solitaire
*
bonté de l’homme
il se tenait devant
les portes
régal
pensers fluides
libéré
*
bourgeonnements
nette découpe
arbres épanouis
miroitants de chaleur
une majestueuse
station de croix
*
forte de paroles
langue honnête
cœur qui tisse
des chaînes
entre frères
élévation
lumière
*
instant et mouvement
résolument optimiste
ceci est éternel
quelque chose
derrière l’apparence
vas-y, voilà pourquoi!
Les mains
Nos visages pâlis par la lune morte, par l’hiver
de nos mains noircies par la terre,
de fissures pleines de sang, des volutes
imprimées dans la cendre – nous avons signé notre œuvre.
Nous avons extrait la violence de la noirceur
du puits, nos mains nues enserrant
les gorges ; les index et les pouces avides
ont tranché, éventré, brûlé
un océan de chairs brunes.
Levez vos mains –prêtez serment,
cela ne supprime pas les hurlements dedans,
peau et tendons blanchissement des jointures
quand je saisis le livre saint, et la crosse de fusil.
Inondation
Des arbres sont abattus, des pieds squelettiques emportés
par le sol mis à nu, les eaux plient leurs articulations
et toutes ces relations se noient.
Des rameurs pagaient en silence
parmi les hurlements de langues immortelles,
ils tanguent doucement dans le sillage, les morts reposent.
Des inconnus innombrables flottent en aval de la rivière,
se heurtant dans une ultime conversation
qu’aucun mot ne peut rapporter.
Des torches dérivent posées sur les eaux gonflées du fleuve,
des nuages passent sur nos toitures,
balayant l’onde chatoyante.
Sur la cheminée la petite télé nous ridiculise;
nous nous gavons d’eau avalant des enfants réfugiés,
chassés par la terre des montagnes.
Hêtre
Le dessèchement de l’arbre quand son bois
est recouvert d’écorce molle, l’encerclement
de la sève qui a durci, tu vois
j’entre, quand les cercles de la vie conduisent
vers des cercles intérieurs de sagesse ; peu importe
maintenant les feuilles et le lierre envahissant
Chaque année les vents deviennent plus violents, les torrents
emportent loin la poussière de la terre
et je grandis, audacieux, au- delà des tremblements
la venue de l’hiver et ton trépas
quand l’âme s’apprête à partir, devenant
plus calme et anticipant son dernier pas.
Laisse-moi voir où est le dessèchement,
et ce qui reste à jamais vigoureux,
ce que le feu et le froid vont combattant
mais ne peuvent arrêter – qu'est-ce que je deviens ?
PATRICK WILLIAMSON
Poète anglais, Patrick Williamson est né à Madrid en 1960 et vit prés de Paris. Il a publié plusieurs recueils
en anglais. Il a traduit, entre autres, des choix de poèmes du poète tunisien Tahar Bekri et du poète québécois Gilles Cyr, et édité Quarante et un poètes de la Grande-Bretagne (2003). En 1995 et
2003, il est invité au Festival International de Poésie à Trois-Rivières au Québec. Actuellement, il prépare une anthologie bilingue de poètes francophones d’Afrique et du monde
arabe.