Course à pied
Dans le champ, à l’ombre,
paisibles, les vaches paissent –
J’avale les bornes.
*
Neige
Flaques d’eau éparses /
bonjour et adieu déjà –
Flocons de syllabes.
*
Ce qui reste
à V. Motard-Avargues
Ornières fugaces,
un avion creuse le ciel –
Angoisse à demeure.
*
Toile
Dimanche, une tache
d’or dessus l’aplat des heures –
Staël dans mes pensées.
*
Nord/Sud
Au journal du soir
inondation dans le Sud –
Douceur du repas.
Procrastination
L’herbe déjà haute ;
la tondeuse sur les dents –
Les mains dans les poches.
Extraits d’un recueil en chantier intitulé « Pas par quatre chemins »
Y r’pleut
Ici, ça ne dure pas,
toujours ça tourne à l’orage,
et y r’pleut
comme on dit par chez nous.
Un cri de mouette,
pour nous rappeler l’été,
zèbre soudain ce tonnerre
d’abattement grisâtre.
(Toboggan, balançoire,
rêvant de cigales,
ont depuis belle lurette
enjambé le mur du jardin.)
Et c’est ainsi que tombe
de nos mains moites
comme le poids maussade
d’une vache sur nos tongs
et la moindre perspective
d’un château de sable.
Tout ce bruit
Tout ce bruit !
La piscine est pleine,
ce dimanche,
comme un œuf
cassé
par tous ces cris
de mouette
de l’arbitre
au bord du récipient.
Tout ce bruit !
que nous sommes,
ce dimanche,
à regarder
tous ces corps
en herbe
qui plongent
pour parfois rien
qu’un brouillon beau de crawl
entre les lignes d’eau.
Ô loin
Au loin, porté par le vent,
un train qui passe,
aussitôt poursuivi,
depuis mon salon,
par la vapeur d’un rêve.
Viaduc de la Souleuvre
Il a payé cher
pour pouvoir jouer à la chute
de l’ange,
pour que sa vie, sous peu,
ne tienne
qu’à un bout d’élastique.
Du garde-fou
le regarder s’approcher
un peu plus près du bord
me suffit. Pas téméraire
pour un sou, je n’irai pas au-delà d’un saut
de ligne
sur un bout de feuille
tremblante,
feignant de fendre, détachée, l’air du temps.
Rebelote
Septembre de retour. La rentrée des classes. On va retrouver son rythme de croisière. Capitaine ou simple mousse, on n’y coupera pas. On se laissera souvent bercer par l’absence de mystère ou de fard. Du fond d’une parole ou d’une pièce vides, parfois chantera
sans heurt
un coucou
ou à peine plus haut qu’un cri d’herbe – se rêvant mouette – au large de la semaine.
Extraits d’un autre recueil en chantier intitulé « Sur la pente du soleil ».
MORGAN RIET
Il se présente :
Morgan Riet est né en 1974, à Bayeux, dans le Calvados. Il y réside toujours. Il est l’auteur de : Lieu cherché, chemins battus (éd. Clapàs – 2007), En pays disparate (même éditeur – 2010), Midi juste environ (autoédition – 2011), Du côté de Vésanie, illustré par Matt Mahlen (éd. Gros textes – 2012), Ça brûle (-36° édition – 2012), Quelque chose, photos de David Lemaresquier (éd. Les Tas de mots – 2013), Vu de l’intérieur, illustré par Hervé Gouzerh (éd. Donner à voir – 2013) et A fleur de poème, illustré par Matt Mahlen (même éditeur – 2016).